Au détour d'un rayon.

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Enfin le soir ! Dorian avait attendu ce moment avec impatience. Il fallait dire que sa première journée dans l’Académie avait été assez éprouvante. Etant le petit nouveau de sa classe, il avait été au centre de l’attention. Ce qui l’avait plutôt mis mal à l’aise. Quel changement, lui qui n’avait connu que les moqueries et l’attitude hautaine des enfants de son village ! Et pourtant, le jeune garçon avait gardé le silence pendant toute la journée.
Il n’avait cessé de compter les heures le séparant du moment où l’astre solaire laissait sa place à sa douce épouse afin de prendre du repos. Mais, quelle surprise ! Ce dernier ne céda son trône que plusieurs heures après l’heure habituelle ! C’était normal, puisque Alcea Rosea n’était pas située au même niveau géographique que Sinnoh, mais cela ne fit que renforcer son malaise. Avait-il eu vraiment raison de partir de chez lui ?
Enfin l’interminable jour fut chassé par son heure favorite. Il ne lui restait plus qu’à retrouver Oscar, qui était parti dormir quelque part, le temps que les rayons solaires soient dissipés par la sereine lueur d’argent de la Reine nocturne. Seulement, si Dorian n’avait aucun mal à venir à sa rencontre chez lui, ici c’était une tout autre paire de manche. Si l’endroit était moins étendu que sa montagne natale, il était bien plus fréquenté. Pas facile, donc, de trouver un coin isolé. Et puis, il venait tout juste d’arriver, il n’avait strictement aucune idée de la cachette du hibou miniature.

Dorian parcourait donc le campus, à la recherche de son ami. Il n’osait pas l’appeler, de crainte de le réveiller en sursaut. Soudain… La pokéball à sa sphère trembla, de plus en plus fort, jusqu’à se scinder en deux. Une explosion de lumière en surgit, qui se matérialisa en une petite boule de tissu sombre. Celle-ci se déplia, dévoilant une petite corne ainsi que deux yeux malicieux. Lupin. Le Polichombr qu’on lui avait donné lors de son arrivée.
Ce dernier posa sur lui son regard à l’éclat de soleil. Il le considéra un instant… Avant de lui tirer la langue et de s’enfuir.

« Ah ! Lupin, non attends ! Il faut trouver Oscar ! Lupin ! »

Mais le petit fantôme ne l’entendait pas de cette oreille ! Il était resté enfermé toute la journée, il voulait s’amuser ! Et puis, si c’était pour se coltiner ce rabat-joie de piaf, non merci ! Il y avait des choses beaucoup plus intéressantes à accomplir… Comme dans ce bâtiment à l’écart.
Le morceau de tissu animé traversa le mur, faisant fi de la matière censée lui faire obstacle. Au grand désespoir de Dorian. Il ne l’avait pas depuis longtemps, mais avait rapidement compris le fonctionnement de cette créature qui avait embrassé la Mort. Elle n’en faisait qu’à sa tête, surtout quand Oscar était absent. Et si jamais il venait à embêter quelqu’un ? Non, il ne pouvait tout de même pas se faire des ennemis dès son arrivée !
Paniqué par les conséquences des actes perpétrés par son pokémon, le jeune garçon fit le tour de la bâtisse afin d’y entrer. Lui était obligé de prendre la porte…

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Willow eut un bâillement en regardant la pile de livres à ses côtés. Elle avait beaucoup travaillé pour terminer son devoir sur l’élevage des créatures de Feu. Mais elle venait d’achever son devoir, à rendre pour le lendemain. A dire vrai, elle aurait pu s’y prendre avant, mais elle avait passé sa semaine à faire des recherches très voire trop poussées sur les Pokémon feu. Ainsi, son devoir était très complet, comprenant des détails pour chaque espèce. Ça avait été un travail plutôt titanesque, mais elle venait d’en venir à bout. Elle eut un long soupire et ferma les yeux quelques minutes, le temps de se reposer un peu et de réfléchir à la suite des événements. Elle devait impérativement ranger les livres qu’elle avait empruntés, avant de retourner dans son dortoir. Elle prit quelques minutes pour se motiver et rouvrit les yeux, ramassant la pile de livres qui trônait fièrement sur sa table. Elle partit les ranger, et ne prit guère de temps, connaissant la bibliothèque à force d’y passer un temps considérable, et après sa semaine de punition enfin achevée. Elle replaça les lourds ouvrages à leurs places, dans la section pokémonologie. Elle était plutôt lente, à dire vrai, les manuels étaient sacrément épais.

Alors qu’elle remettait le dernier livre en place, elle vit Hibana surgir et l’interpeller à grand renfort de cris et de quelques étincelles furibondes. Elle dormait tranquillement, quand elle avait entendu un petit rire. Et elle avait vu un Polichombr s’emparer des dix pages de son devoir, avant de s’enfuir avec. Ne sachant quoi faire, elle était venue alerter sa dresseuse de l’évènement. La jeune femme se mordit la lèvre sous l’angoisse. Le devoir était pour demain, elle ne pouvait pas se permettre de le perdre !

Sa Pokémon partit dans une direction bien précise, et la demoiselle s’élança à sa suite. La bestiole électrique suivait le chapardeur à l’odeur. Non pas que les spectres en possèdent forcément une, mais le devoir, lui, était imprégnée de l’odeur de Willow, mélangée à une effluve d’encre, un peu particulière. Ainsi, il était facile de pister le devoir volé. Par contre, le rattraper, c’était une toute autre affaire… Une véritable course-poursuite s’engagea dans la bibliothèque, la Négapi grimpant sur des étagères, faisant parfois tomber des livres, pour tenter de projeter des éclairs sur le spectre, ou de le rattraper d’une Vive-Attaque. Les idées étaient bonnes, mais la maudite poupée parvenait toujours à leur échapper.

Pourtant, la brune finit par avoir une idée pour prendre le Pokémon à revers. Elle confia à sa Pokémon électrique le soin de le traquer dans le bâtiment, et de le ramener vers elle. La souris eut un signe de tête affirmatif, grimpa au sommet d’une armoire, et envoya des éclairs sur le fantôme, le ratant délibérément, avant de se lancer à sa poursuite, à nouveau. L’idée était simple, la bestiole devait rapatrier le voleur vers sa maîtresse, qui avait laissé sa Skitty sortir. Elle avait ordonné à Atsa de se tenir un peu plus tranquille, et d’attendre l’arrivée du Polichombr en face d’eux. Hibana poussa un cri, pour les avertir que sa cible se rapprochait. Lorsque le spectre surgit face à eux, la réplique ne se fit pas attendre.

« Atsa, Attraction ! »

La boule de poils rose émit un petit miaulement attendrissant en remuant ses oreilles et sa queue, tandis que des cœurs roses partaient de son corps pour aller percuter le Polichombr adverse. L’attaque finit par avoir l’effet désiré, à savoir l’attirance de l’ectoplasme pour le chaton, ce qui lui fit oublier son larcin. Willow récupéra ses affaires, et jeta un œil circulaire autour d’elle. Des livres jonchaient le sol un peu partout, et ils avaient dû faire un sacré capharnaüm à eux quatre… Elle allait devoir tout ranger… Et elle avait aussi un autre problème : ce Pokémon spectre ne semblait pas sauvage… Donc appartenant à quelqu’un… Mais qui ? La brune lâcha un soupire.

« Je vais y passer la nuit… »

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Dorian pénétra enfin dans le bâtiment… Et s’immobilisa de surprise. Il ne s’était certainement pas attendu à voir ça ! En tout cas, pas aussi éloigné du bâtiment principal de l’Académie…
Des dizaines et des dizaines de rayons de livres, traitant tous de sujets divers et variés ! Une véritable découverte pour lui ! Il n’avait jamais vu de bibliothèque aussi spacieuse et fournie ! En même temps, celle de son village était assez pauvre, il fallait le reconnaître… Et encore, pour le moment, il n’avait qu’une petite vision depuis l’entrée. Le jeune Spiraea avança doucement entre les rayons, tournant la tête pour voir quel genre d’ouvrages étaient proposés. Il y avait vraiment de tout… Il trouverait certainement un livre parlant des pokémon nocturnes !
Un cri le tira de ses pensées. Le jeune garçon s’immobilisa un instant, comme perdu. Il lui fallut entendre une autre plainte pour qu’il reprenne conscience de la réalité et se souvienne du pourquoi sa présence en ce lieu. Lupin ! Il devait le retrouver ! Or, d’après ce qu’il venait d’ouïr, ses craintes venaient de se réaliser…
Dorian se mit à courir entre les rangées porteuses de savoir, délaissant son intérêt passé pour ces ouvrages si riches à ses yeux. Ils ne s’envoleraient pas, contrairement à la boule de tissu capricieuse ! Il aurait tout le temps d’effectuer quelques recherches, un peu plus tard. Une fois ce petit fantôme calmé…
Il arriva enfin sur les lieux du probable crime… Mais freina sec. Il y avait bien quelqu’un. Tremblant de peur, rouge de honte, le jeune garçon s’adossa à un rayon. Il glissa le long du meuble, la tête entre ses mains. Oh non… Ce qu’il avait à tout prix voulut éviter était devenu une réalité. Qu’allait-il faire ? En plus, Oscar n’était même pas là, il était vraiment seul.
Le Spiraea s’obligea à respirer longuement pour se calmer. Doucement, du calme… Peut-être que cette personne ne l’avait pas encore vu… ? Mais, même si c’était le cas, il ne pouvait pas repartir comme ça, l’air de rien. Il en était certain, bien qu’il n’ait pas vu les dégâts provoqués, c’était son pokémon qui était responsable de cet incident. Et donc, par extension, c’était lui, Dorian, qui devait prendre la responsabilité du comportement du fantôme capricieux. Mais… Et si cette personne se montrait hostile, que devrait-il faire… ?
Perdu comme il l’était dans ses pensées, il ne remarqua pas que Lupin était revenu vers lui. Ni même qu’un petit rongeur crème et azur s’était approché de lui, visiblement mécontent au vu des éclairs parcourant sa courte fourrure…

[un peu court, mais... Voilà, quoi ^^"]

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Le spectre s’était calmé suite à l’Attraction de la Skitty. C’était toujours ça de gagné, et la Menthae soupira, soulagée que ce démon veuille bien s’apaiser. Elle commençait à ramasser des livres pour les empiler sur un charriot qui traînait, lorsqu’elle vit le fantôme lévitait dans un coin de la bibliothèque. Surprise par son étrange attitude, Hibana avait abandonné le rangement du lieu pour prendre l’ectoplasme en filature, chose peu complexe vu l’état second dans lequel il semblait être. Elle laissait échapper quelques éclairs, au cas où elle devait subitement l’attaquer s’il recommençait à mettre la panique. Mais au lieu de ça, elle découvrir, sous ses yeux ébahis, un garçon qui semblait totalement perdu et… terrorisé… ? Devant l’attitude effrayé de l’inconnu, elle cessa de produire de l’électricité, du moins, de la laisser jaillir, et fit bouger doucement ses oreilles, comme pour capter des sons, et le rassurer. Il avait l’air d’être le dresseur du chapardeur, mais surtout, il avait quelque chose dans ses gestes qui rappelaient à la Négapi quelqu’un. Quelqu’un qu’elle connaissait bien : sa propre dresseuse. Une personne qu’un rien effrayait, qui avait des ennuis avec son Pokémon, et qui ne savait pas quoi faire. Qui avait le sentiment d’être oppressé par le monde… Sauf que la dresseuse de la souris était probablement plus âgée que le brun face à elle, et arrivait à mieux gérer ses émotions. Ne sachant pas précisément quoi faire, la Pokémon se contenta d’appeler sa maîtresse d’un simple cri.

La demoiselle entendit l’appel de sa première amie et déposa les livres qu’elle tenait sur un charriot, pour aller retrouver la bestiole électrique. Atsa la suivait, remuant joyeusement de sa queue ornée de pompons. La jeune fille freina brusquement en apercevant un garçon, plus jeune qu’elle, recroquevillé sur lui-même. Le Polichombr se tenait bien tranquillement près de lui. Il devait être son dresseur. Elle comptait faire des reproches au dresseur qui avait laissé son Pokémon agir de la sorte. Enfin, des reproches à sa manière, donc rien de bien effrayant ou marquant. Mais en le voyant dans cette attitude apeurée, elle ne put se résoudre à lui reprocher quoi que ce soit. Il avait l’air victime de son Pokémon et extrêmement gêné. Elle avait tellement l’impression de se voir, elle, il y a quelques années plus tôt… Elle ne savait pas comment réagir. Néanmoins, elle finit par s’agenouiller en douceur face au jeune garçon, et posa avec délicatesse sa main sur son bras, pour ne pas l’effrayer.

« Bonsoir… Je… Euh… Je m’appelle Willow… Willow Mel Cross… Je suis une… Une Menthae. Et toi… ? Ce Polichombr est à toi…? Tu… Tu n’as pas à avoir… peur tu sais… Je ne vais pas… T’en vouloir pour ça… C’est pas très grave… D’accord… ? »

Elle trouvait qu’il lui ressemblait tellement. Pour un peu, elle l’aurait enlacé, pour le rassurer. Elle aurait aimé lui parler avec assurance, lui dire que ce n’était rien. Mais elle en était bien incapable. Et elle craignait de l’effrayer encore plus. Elle réfléchit encore un peu et regarda les livres jonchant le sol autour d’elle. Elle hésitait encore sur la marche à suivre, mais finit par poser doucement sa main sur sa tête, avec un sourire.

« Je… Ecoute… Si… Si tu veux, tu… tu peux m’aider à ranger le… les livres… C’est de ma faute s’ils sont… par terre… Et je… je m’excuse pour ton Polichombr s’il… s’il semble bizarre. Atsa, ma Skitty a… a dû avoir recours à une Attraction pour… Pour le calmer… Je n’ai trouvé que cette solution… Pardon… »

Finalement, elle se releva, et lui tendit la main, l’invitant à se mettre debout également, et à lui venir en aide. Elle ne lui reprocherait pas de refuser. Non, elle ne lui en voudrait absolument pas, même si elle ne serait pas contre un coup de main. A deux, ils remettraient la bibliothèque en ordre plus vite…

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Contre toute attente, la jeune fille ne semblait pas hostile. Au contraire, on aurait dit qu’elle cherchait à le rassurer. Pourtant, elle aurait dû être furieuse, non ? Après les dégâts provoqués par la boule de tissu capricieuse, il y aurait eu de quoi…
En voyant qu’elle avançait sa main pour la poser sur son bras, Dorian eut le réflexe de s’écarter brusquement. Ce n’était pas qu’il refuse tout contact. Mais le souvenir des brimades de ses anciens camarades de classe était ancré tellement profondément en lui qu’il se mettait instinctivement sur le défensive dès que quelqu’un tentait de l’approcher. Bizarrement, s’il se montrait complètement ouvert envers les créatures les plus sauvages et hostiles –notamment celles de sa montagne natale-, il était devenu complètement méfiant vis-à-vis de ses congénères. Parce qu’on le considérait comme anormal. Il avait donc développé un instinct de survie.
Il y avait également une autre raison. Willow, sans le savoir bien entendu –comment aurait-elle pu être au courant, alors que seulement six personnes dans le monde le savaient-, avait failli poser sa main sur son bras meurtri par l’horrible brûlure occasionné lors de son ‘exorcisme’. Si la douleur s’était estompée, elle revenait facilement dès que qu’on la touchait. Dorian la dissimulait du mieux qu’il pouvait sous des bandages et des chemises à manches longues, mais même le contact du tissu suffisait parfois pour raviver ce mal sinistre.

« D… Désolé… »

Il baissa de nouveau la tête et le regard, alors que son interlocutrice se présentait. Willow Mel Cross, des Menthae… L’annonce du nom de la maison de jade détendit légèrement le jeune garçon. Au moins, il aurait moins de problèmes que si elle avait été des Narcissus.

« Je m’appelle Dorian Wilde. Je suis de Spiraea » Dit-il dans un souffle.

Un petit silence s’installa. Mais vite brisé par la jeune fille.

« Je… Ecoute… Si… Si tu veux, tu… tu peux m’aider à ranger le… les livres… C’est de ma faute s’ils sont… par terre… Et je… je m’excuse pour ton Polichombr s’il… s’il semble bizarre. Atsa, ma Skitty a… a dû avoir recours à une Attraction pour… Pour le calmer… Je n’ai trouvé que cette solution… Pardon…
- N… Non, c’est de ma faute ! Je… Lupin ne m’écoute jamais… »

Il aurait voulu dire autre chose… Mais il ne savait pas quoi. Alors il se redressa soudainement et commença à ranger les livres dans les rangées, alors que son Polichombr continuait de flottait hasardeusement autour de lui, encore affecté par l’attaque du chaton.

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Elle l’avait vu se rétracter à son geste, mais elle ne pouvait rien y faire. Il était un peu étrange. Mais elle l’aimait bien. Et pour une fois, elle se sentait non pas supérieure à quelqu’un, mais maîtresse de la situation, et elle pouvait devenir une aide pour le garçon qu’elle venait de rencontrer. C’était surprenant la façon dont elle avait l’impression de se revoir en lui. Elle ne saurait pas expliqué pourquoi elle réagissait de la sorte, mais c’était ainsi, et personne ne pourrait changer sa vision des choses. Elle le regarda s’affairer à ranger les livres, après qu’il se soit présenté, et excusé du comportement de son spectre. Il ne semblait pas très à l’aise. Elle sourit, pour tenter de détendre l’atmosphère, même si elle n’en menait pas large non plus.

“Ca n’est pas grave et euh... C’est gentil.. De ne pas m’en vouloir... pour ton Polichombr..."

Elle commença à s’atteler au rangement. Il y avait des livres un peu partout, et c’était une sacrée pagaille qu’ils avaient tous mis. Le chaton se chargeait de traîner les livres près du chariot, afin que sa dresseuse puisse les placer dessus. La demoiselle ramassait les livres, les rangeait quand elle pouvait le faire. Quant à la souris électrique, elle utilisait à nouveau ses Vive-Attaque pour grimper au sommet des étagères, et remettre les livres en place. Elle connaissait les rayons et elle était d’une efficacité plutôt redoutable, après avoir passé plusieurs jours à arpenter la bibliothèque de long en large.   La Menthae continuait de s’affairer, consciencieuse dans son travail. Pourtant, elle trouvait le silence dans la pièce glaçant et il la mettait mal à l’aise. Elle se sentait presque inquiète de cette ambiance lourde qui régnait dans la bibliothèque. Elle chercha ses mots, essayant de trouver quelque chose à dire, pour tenter d’établir un contact avec le garçon.

“Je... Tu sais... J’ai moi-même une... une Pokémon qui ne... m’obéit pas du tout. Elle m’attaque même quand je... quand je veux essayer de... de me lier à elle... Alors je... Ne vais pas t’en vouloir pour... pour ton Polichombr...”

Elle réfléchit quelques instants. Pour le moment, il n’avait qu’un Pokémon, qui semblait lui poser problème. Mais comme tout dresseur d’Alcea, il devait bien en avoir un autre, un deuxième, quelque part, non ? Ca l’intriguait quelque peu. En règle général, les rapports entre plusieurs Pokémon établissaient plusieurs comportements, allant de la domination de l’un par rapport à l’autre à une totale complicité qui leur permettaient de faire les quatre cent coups dans le dos de leur dresseur, en passant aussi par un potentiel lien d’aversion entre les deux individus. Peut-être que son deuxième Pokémon pouvait régler l’affaire...? Elle l’ignorait. Mais elle avait envie de parler... Ce silence la mettait bien trop mal à l’aise.

“Je... Tu n’as pas d’autres Pokémon...? Peut-être qu’ils pourraient... calmer les ardeurs de ton Polichombr... non ? Et euh... peut-être que... qu’un autre Pokémon... Un nouvel ami... pourrait t’aider...?”

Elle ne savait pas quoi dire de plus. Tout ceci la perturbait grandement, elle ne savait pas quoi faire, ni ou se mettre. Elle venait de finir un rayon et décida de s’approcher de celui dont s’occupait le jeune garçon, ses Pokémon sur les talons. Elle s’approcha de lui et inspecta d’un rapide coup d’oeil les étagères, ses yeux passant rapidement sur la succession de lettres et de chiffres. Elle repéra cependant, quelques mètres plus loin, des livres mal rangés. Ca n’était pas la faute de Dorian, probablement celle d’un autre élève peu consciencieux. Elle saisit le livre, continuant d’assimiler les informations, triant les livres les uns après les autres. Elle regarda ensuite le jeune Spiraea et sourit timidement.

“Alors euh... Depuis combien de temps tu... tu es à Alcea... Et euh... pourquoi...?”

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Un silence étrange s’était installé entre eux, seulement perturbé par les bruits émis par les créatures qui s’affairaient autour d’eux et le doux son du frottement des livres que l’on insérait dans les étagères. Lupin continuait de flotter hasardeusement entre les rayons. Le regard vide, il passait parfois à travers une étagère, parfois se retrouvait la tête à l’envers. Mais au moins, la petite boule de tissu aussi sombre qu’une nuit sans lune ne faisait plus des siennes. Dorian espérait intérieurement que son état, qui n’était pas si grave que cela, d’après son interlocutrice, ne se dissiperait qu’après l’arrivée du petit hibou au plumage épais. Sinon… Il risquait fortement de reprendre ses caprices. Quoique… Peut-être se montrerait-il plus calme tant que Willow et ses compagnes demeureraient dans les parages. Vu de quelle manière elles l’avaient calmé…
Finalement, la Menthae brisa l’absence totale de parole. Le jeune garçon hésita avant de répondre.

« Si, j’en ai un autre… Mais, je le laisse toujours en dehors de sa pokéball. Je n’aime pas l’enfermer. Et puis, sinon, il dort mal dans la journée. J’étais justement à sa recherche quand Lupin en a profité pour me jouer un tour… »

A peine avait-il fini ces mots qu’un bruissement à peine perceptible attira son attention. Un humain normal ne l’aurait certainement pas remarqué. Mais lui connaissait son vieil ami depuis des années. Il aurait reconnu son noble hululement, le léger frottement de l’air produit par ses plumes entre mille. D’ailleurs, Oscar se manifesta, comme pour lui confirmer sa venue. Le jeune Spiraea leva les yeux vers la Voix de la Montagne, qui venait de se poser sur l’étagère au-dessus de lui. Le regard ambré du sage rapace des nuits ressortait comme deux soleils paisibles dans l’obscurité du lieu. L’être céleste déploya ses ailes silencieuses et, sans heurt tant pour les oreilles que pour la vue, fondit gracieusement sur l’épaule de son jeune ami, qu’il enserra doucement de ses serres sans pour autant la blesser de ses armes mortelles. Oscar se redressa et posa ses iris lucides sur la jeune fille. Une grande noblesse, une prestance se dégageait de lui. Son regard n’avait pas cette indécence qui, chez ses congénères pouvait paraître indiscret car semblant mettre à nu l’âme des mortels. Il ne mettait pas mal à l’aise. Au contraire. Il réconfortait.
La Voix de la Montagne inclina la tête respectueusement, avec un léger claquement de bec qui se voulait tout sauf menaçant. Ce simple salut acheva de rassurer le jeune garçon. Willow n’était certainement pas quelqu’un de mauvais pour qu’Oscar agisse ainsi.

« Voici Oscar. C’est mon plus vieil ami. On se connaît depuis des années. »

Il n’osa pas ajouter que le vénérable Hoothoot était le seul qui parvenait à contenir Lupin. Par contre, la deuxième question de Willow dissipa quelque peu l’enthousiasme que la venue de son fidèle compagnon avait provoqué.

« Je suis pas ici depuis très longtemps. Je savais même pas que ça existait. C’est mes parents qui ont décidé de m’inscrire. Pour m’éloigner de chez moi. Ah ! »

Il s’aperçut que ce qu’il venait de dire sonnait comme si ses parents avaient souhaité se débarrasser de lui.

« Mais ne te méprends pas, c’est pas du tout parce qu’ils veulent pas de moi, hein ! Au contraire, ils veulent me protéger. »

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Comme tout élève, Dorian avait en effet un second Pokémon. Un magnifique Hoothoot fit son apparition, faisant légérement sursauter Willow, qui ne l'avait pas entendu arriver. Elle admira le bel oiseau, dont le garçon semblait particulièrement proche. Les iris du chasseur nocturne la fixait, mais elle n'était pas mal à l'aise. Ce n'était pas le regard d'un prédateur. Ni celui d'un oiseau qui vous sonde. Il devait probablement être en train de l'étudier du regard, oui, pour savoir si elle était digne de l'amitié -si un tel lien venait à les unir un jour- de son dresseur. Au bout de quelques instants à se toiser l'un l'autre, le hibou inclina la tête, et elle comprit qu'elle venait d'obtenir son approbation. Alors à son tour, elle lui rendit son salut, avec un timide sourire, assez impressionnée par la prestence de l'animal.

Elle écouta les propos de Dorian, avec une attention toute particulière. En règle général, elle décodait chaque phrase, essayant de déceler un mot plus révélateur qu'un autre sur l'état, le passif, l'émotions d'une personne. Ainsi, les quelques mots étranges de la réponse du jeune garçon ne lui échappèrent pas, et elle releva vers lui un visage surpris. Elle le dévisagea mais avant d'avoir pu prononcer un seul mot, il corrigea ses propos, l'air un peu confus. Elle resta songeuse un long moment, reportant son regard vers les tranches des livres. Les pensées tournaient inlassablement dans sa tête. Pour l'éloigner de chez lui ? Ses parents ? Le protéger ? Voilà qui lui rappelait bien des choses. Un vivace éclair lui traversa l'esprit, ses yeux se voilant lentement. Un écran sembla s'interposer entre ses yeux et le monre réel, Dorian, et leurs Pokémon. Elle se figea, sa main s'accrochant au bois de l'étagère, tandis que des éclats de voix résonnaient dans sa tête, cinglant son pauvre esprit, alors que les images continuaient à passer, un cercle dont elle était le centre, le milieu, la cible. Elle était entourée par d'autres personnes de son âge, alors qu'elle avait elle-même rétrécie. Elle sentit, malgré elle, son souffle devenir plus court, et un peu plus rapide. Mais brusquement, les images cessèrent et le retour à la réalité fut brutal. Elle regarda à ses pieds et aperçut sa Négapi qui l'observait, inquiète. Elle avait dû électrocuter sa maîtresse pour espérer la faire revenir sur terre, pour qu'elle réagisse aux propos de Dorian. Rougissante, la jeune demoiselle regarda le Spiraea et se passa une main dans les cheveux, un peu mal à l'aise.

"J'ignore pourquoi... Pourquoi tes parents voulaient... te protéger en t'envoyant... ici... Mais... je... J'ai presque envie de dire que... Je suis ici pour les mêmes raisons que... que toi... La situation n'est... pas la même... Je ne pense pas... Mais... Inconsciemment, ils ont voulu... Me protéger... Me protéger et... Veiller à ce que j'arrive... à me défendre à l'avenir..."

Ses propos devaient paraître bien obscur au garçon et elle rougit, un peu mal à l'aise. Elle chercha de quoi éclaircir ses propos, pour les rendre plus clair.

"Enfin, disons que... Ils ont voulu, comme chaque parent que... que leur enfant puisse grandir dans un bon univers !..."

Elle trouva sa réplique pitoyable, mais il était un peu tard pour revenir dessus. Elle chercha aussi à lancer un autre sujet de conversation, et regarda le spectre qui lévitait paisiblement, l'air ailleurs. Elle eut un faible sourire, et chercha à enchaîner.

"Tu ne crois pas que... que... Que si tu avais un troisième Pokémon... Lupin serait... plus calme...? Enfin ça n'est.. qu'une idée... Mais j'aimerais bien... t'aider..."

C'était une idée comme une autre mais ça pouvait toujours lui être utile, si un bon rapport s'installait entre eux. Elle cherchait à l'aider, mais aussi à éviter les sujets trop douloureux. Elle l'aimait bien, elle voulait bien devenir son amie, cependant, elle sentait que s'ils s'engageaient sur les chemins dangereux de chacun, ça serait un peu trop brutal... Peut-être parce que, s'il était comme elle, seul son premier Pokémon savait ce qu'il avait enduré. Elle n'en savait rien. Mais elle ne voulait pas l'effrayer d'avantage...

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