Une sonnerie tonna dans toute l'académie à cinq heure de l'après-midi.

Elle marquait la fin tant attendue des cours et le début des activités parascolaires, qui comprenaient des matchs amicaux, des entraînements entre les dresseurs, des défis à relever et des débats stratégiques - effectivement, oui, tout était centré sur une notion : les pokémons.
Mais cette fin de journée fut aussi l'occasion pour un groupe d'étudiants de se faire entendre par Laureen Howard, damné soit-elle.

« Et pourquoi tu ne veux pas relever le défi, miss ? T'as peur de perdre ? »

Tout le monde savait le sort qu'on réservait aux délinquants dans cette école - on parlait des mirages mais l’appellation était encore obscure à ce jour pour le grand public. Tout le monde était au courant aussi que c'était une très mauvaise idée de s'en prendre publiquement à l'un des chefs de la team astria. La scène était aberrante et cela expliquait peut-être pourquoi ses témoins continuaient leur route sans murmures entre eux : être impliqué dans une histoire avec un des représentants de l'organisation, c'était se compliquer inutilement la vie, pour une majorité.

La nature tempérée de Laureen expliquait pourquoi on prenait si souvent la jeune femme pour une proie facile.
En avait-elle l'habitude ? Pour ne pas alimenter les tensions, elle se retenait de leur dire qu'ils n'avaient aucune chance de l'emporter contre elle. Elle prenait son mal en patience, silencieusement, attendant qu'ils leur passent l'envie de continuer à s'acharner inutilement sur sa personne.

« ... »

Occasionnellement bousculée dans son aphasie par leur gestuelle tactile, le temps commençait à être long et les individus semblaient en avoir à perdre.

« Eh les mecs, on vous a jamais appris que c'tait moche de s'en prendre à plusieurs à une fille ? »

Des cheveux châtains dont le ton variait entre le clair et le foncé, un visage de gamin des rues aux traits arrondis et une corpulence d'un adolescent de seize ans. Laureen assista silencieusement à l'intervention du jeunot dans le jeu d'intimidation de ses cadets. Son nom était Jay K.A. Marshall. Il était le préfet des Lychnis, une maison réputée pour le dynamisme excessif de ses membres.

C'était la première fois que Laureen avait le loisir de le décrire d'aussi près : ils n'avaient rien en commun, donc dans la vie de tous les jours, leurs routes ne faisaient que se croiser sans donner suite.
Le remerciant intérieurement d'avoir mis un terme à son calvaire, le visage toujours de marbre, il poursuivit :

« Retournez jouer à la marelle, aujourd'hui c'est mon adversaire. »

À l'avertissement formulé par Jay, les garçons s'échangèrent des regards entendus. C'était une mauvaise idée, conclurent-ils d'un accord commun. Ils ne voulaient pas se risquer à défier un préfet : surtout lui qui, visiblement, était plus enclin que sa supérieure à les provoquer en match et à les humilier publiquement. « C-c'est bon, on plaisantait, c'tout. Pas besoin de t'enflammer pour ça, nab- », un coup de coude du meilleur ami pour prévenir le leader du groupe, « ... ouais bon, bye. » Sans demander leurs restes, ils filèrent à toute vitesse, se retournèrent une fois vers Laureen et Jay, avant de descendre les escaliers sans discutailler.

Une fois s'être assurée que les regards des curieux ne soient plus sur eux, Laureen se tourna vers le préfet des Lychnis, avec un sourire posé :

« Donc, à propos de notre duel, je ne me souvenais pas en avoir de programmé pour ce soir, mais je vous dois bien ça. Je vous propose de me suivre vers les arènes ? »

Était-elle allée trop vite ? Le jeune homme paraissait soudainement très embarrassé : n'était-il pas prêt à l'affronter ? À son tour, elle haussa un sourcil interrogateur, attendant patiemment que le garçon explique sa réaction nonchalante.

« Mais...mais...c'était pas sérieux. C'était pour leur faire peur ! » lança-t-il avec maladresse ; comme si déconcerté.
Elle ne comprit pas immédiatement où il voulait en venir. Il était intervenu - et elle lui en était reconnaissante car elle subissait une bien ingrate compagnie jusqu'à lors, mais ce n'était pas parce qu'il avait à faire avec elle ? Pourquoi avoir pris sa défense en répondant à sa place ? Si les préfets leur juraient allégeances, la Team Astria n'était pas dupe et bien que les tensions étaient réduites, elles étaient bien là.
Le silence fut rompu par Jay, qui ajouta dans un murmure peu convaincu : « Tu sais, comme dans les comics. »

« Pardon ? »

Tout compte fait, c'était peut-être elle, qui doutait trop ouvertement de ses camarades de classe. Il n'avait pas forcément mauvais fond, le préfet. Elle s'en convaincu, par sa réputation (« un grand gamin qui ne ferait pas de mal à une mouche, qui a obtenu son grade par on-ne-sait-quel-miracle ») et la droiture de son regard.
Elle devina qu'il était juste bon et simple d'esprit, qu'il avait fait irruption, parce que cela lui semblait être la meilleure des choses à faire. Quelque chose lui échappait, elle ne saurait mettre le doigt exactement dessus : probablement un détail.
Maintenant, elle s'en voulait presque de l'avoir coupé dans son enthousiasme.

« Oh. » Elle réalisa. « C'était pour me venir en aide. Ce n'était pas nécessaire : je pense qu'ils se lassaient de moi. Si seulement, en revanche, tous les Lychnis faisaient preuve d'autant amabilité. » Pause. « Merci. »

(Je suis également inspirée comme une aspirine. 8D J'accuse mes maux de têtes. ;;)