Que faire quand on a pas cours le lundi après-midi ? Bah squatter un peu plus longtemps le réfectoire. Le truc, c'est qu'il n'avait toujours aucun ami à proprement parler. Il était le nouvel élève transféré quoi, le mec qui arrivait et qui était nouveau, que tout le monde remarquait, notamment à cause de ses lentilles bleues. Il ne se souciait pas des regards sur sa route, ni de quoi que ce soit en fait, le seul truc c'est qu'être tout seul c'était chiant. Il détestait les réfectoires. Parce que c'était préparé à la chaine. Ici, c'était une école élitiste, donc la bouffe coûter un bras & il ne se permettait que la nourriture à sa portée budgétaire. Mais il appris qu'ici, la nourriture était gratos. Parfait. Il était parti pour un bol XXL de Ramen avec un steack et une part de tarte au flan, parce que calcium & protéines, c'était le pied. Mais quand il devait s'asseoir à une table pour manger, il était obligé de se rendre compte... Il trouva une table à deux places, où manger seul dans un coin. Bouarf, c'était pas plus mal, s'asseoir à une table pour manger avec des gens relous, c'était la mort. Il se souvenait au lycée, la tambouille était moins bonne et certaines des personnes qui s'assoyaient aux tables pouvaient vraiment couper l'appétit de l'ancien lycéen pour de bon. Avoir des homosexuels à votre table peut vous couper la chique très facilement, à moins d'avoir l'estomac accroché. Quand on avait une paume d'argent, il fallait s'attendre à devoir serrer toutes les mains. Même celles les moins cool. Oh, la personne en elle-même était pas méchante. Elle était même sympa. Un peu spécial mais bon. Par contre, une fois lancé sur le sujet de sa sexualité, il valait mieux être sourd, surtout si vous êtes vous-même un hétérosexuel.

Monde de merde, il ne voulait pas plus se remémorer la scène. Qu'avait-il fait ce matin-là ? Ah oui, les cours. Il se devait d'y assister de temps en temps... C'était sa première journée de cours depuis son arrivée, vendredi, où il avait décidé de sécher, tout comme samedi matin. Un comportement un peu surprenant de la part d'un Spiraea ... Mais après tout, lors de son questionnaire de personnalité pour l'orientation, ses résultats semblaient lui permettre d'être passe-partout, mais sa priorité d'aider les autres lui avait fait aller chez les Spiraea ... Comment devait-il le prendre ? Pour certains, ils avaient un complexe du super héros... En avait-il un ? Bonne question. Il se pencha en arrière. Sûrement. Il avait déjà risqué sa vie pour une inconnue. Les couteaux qui tranchent l'air, le sang qui coule d'une plaie ... Le tempo de son sang battant à ses tempes alors que fébrilement, il se sentait plus calme que la mort, couteau en main. Non, c'était fini tout ça. Il n'était plus un chef de gang. Du moins, il n'était plus actif en tant que tel ... C'était le requiem du chef des Dollars, ici à Alcea Rosea. De toute façon, dans son fameux gang, personne ne le connaissait. Il s'était éloigner de la banlieue de Céladopole. Son gang n'en étant pas réellement un, il n'abandonnait personne... Les dollars étaient une nébuleuse et tout le monde pouvait en faire partie. Personne ne surveillait les membres, personnes ne les dirigeaient. Ah, si, lui de temps en temps. Ils répondaient à l'administrateur du site, mais personne ne savait que Kamikami était l'autre nom du dirigeant du groupe. Il n'avait pas fuit, non, il avait juste trouvé autre chose à faire dans sa vie, ailleurs qu'à Céladopole. Et puis, peut-être qu'ici aussi, des gens avaient reçu des invitations et étaient membre de son groupe qui n'en était pas un ?

Il soupira. Il aimait sa position. Comme toujours, il observait ni plus ni moins. Oh, il pouvait révéler qu'il était un membre d'un gang. Mais le chef d'un gang, lui ? Il en avait pas la tête. Pas avec son costard. Pas devant son bol de ramen et son steack. Il avait l'air d'un étudiant normal. Le minimum, pour un gang anonyme, c'est d'avoir un chef anonyme et insoupçonné, en cela, Atios apparaissait comme un jeune homme tout à fait normal. Et c'était mieux comme ça. Mais soudain, il releva la tête, sortant de ses pensées, avant de regarder en face une personne qui venait de s'asseoir avec son propre plateau devant lui.

Bgllllllllg.

Le silence complet dans lequel était plongée la salle de classe est soudainement brisé par ce bruit si singulier, et pourtant si reconnaissable. Les élèves se retournèrent comme un seul homme vers un table au fond de la pièce et fixèrent d'un air amusé la demoiselle avachie sur son bureau, les bras serrés autour de son ventre. Cette dernière se releva, balaya ses camarades d'un regard étonné et, sans comprendre la raison d'un tel intérêt envers sa personne, elle reposa son crâne contre le bois et se replongea dans ses rêveries aussi sucrées qu'étranges. Steaks, pancakes, glaces et cookies en tous genres dansaient, chantaient, festoyaient joyeusement dans son esprit ; cette vision idyllique sembla frustrer son cher estomac, qui gronda de plus belle sans qu'elle ne s'en rende compte ; et une nouvelle, elle sentit une nouvelle fois une quarantaine d'yeux se poser sur elle. 11h55, dans une classe de Septième Année : Skye Fable Tanner meurt littéralement de faim. Elle ne parvint pas à détourner ses iris ambrées de la montre-bracelet fièrement accrochée à son poignée. Les secondes défilaient, lentement, sûrement, et la petite aiguille s'approchait inexorablement du 12 inscrit sur le cadran. Le sourire qu'elle arborait continuellement s'agrandissait à mesure que les minutes passaient, et c'est finalement lorsque la sonnerie de l'académie résonna contre ses tympans qu'elle lança le cri de joie qu'elle contenait depuis tout à l'heure. Rapidement, l'adolescente rassembla ses affaires, pour la plupart éparpillée sur le sol — maladresse, bonjour ! — et s'empressa de sortir de la classe.

Bien entendu, elle n'avait strictement rien suivi du cours auquel elle venait d'assister. Mais Ethan l'aiderait sûrement à revoir les notions qu'elle avait loupées. Il faut dire que son cher cerveau, en plus d'être peu réactif, s'était vu assailli par de violents signaux en provenance du ventre de la demoiselle pendant toute la durée de l'heure. Oh, la Tanner avait pris soin d'engouffrer une forte quantité de nourriture au petit déjeuner, comme elle le faisait à son humble habitude ; mais Arceus avait souhaité la pourvoir d'un estomac gourmand à l'ampleur d'un trou noir. Et seul ce Dieu Pokémon pouvait savoir à quel point une Skye affamée pouvait être difficile à vivre. La concernée, après s'être trompée de chemins à plusieurs reprises, parvint enfin à atteindre le sacro-saint réfectoire qu'elle aimait tant. Elle se faufila dans la file d'attente déjà bien remplie et se mit à regarder avidement les plats fructueux que préparaient les cuisiniers derrière le self. Son tour arrive, par chance, à une vitesse astronomique ; plateau en main, elle remplit copieusement son assiette de la plupart des plats disponibles ce jour-là et, une fois son repas jugé assez consistant par ses soins, elle se perdit dans la foule agglutinée dans la pièce et se mit à la recherche d'une place.

Depuis son arrivée, Skye avait pris l'humble habitude de déjeuner en compagnie de son frère, ou avec certains de ses camarades Lychnis lorsque que Monsieur Ethan manquait à l'appel. Néanmoins, ce jour-là semblait propice à l'afflux d'élèves, et à son grand désespoir, la Tanner ne trouva aucune table convenable sur laquelle elle pourrait bien s'installer. Son regard glissa dans chaque recoin du réfectoire, et elle finit alors par apercevoir, dans un coin reculé, un élève seul, attablé en face d'une chaise vide. La jeune fille ne chercha même pas à comprendre la situation : ni une, ni deux, elle s'approcha de l'inconnu, tira le siège libre en face de lui et posa son plateau sur le côté de la table non-occupée tout en prenant place sur la chaise libérée. Elle jeta un coup d’œil curieux au garçon : ses cheveux de jais en bataille et ses yeux bleus profonds — des lentilles ? — ne lui disaient strictement rien.

Une minute ... lentilles bleues ? Elle tenta tant bien que mal de se remémorer les échos qu'elle avait bien pu entendre depuis le début de la semaine. Tous parlaient d'un élève transféré aux faux-yeux bleus qui ne lâchait jamais son cher portable. Pas de portable en vue, mais tout laissait penser qu'elle avait affaire au sujet principal des dernières rumeurs d'Alcea Rosea. Elle le dévisagea avec le peu de discrétion dont elle disposait pour finalement afficher un grand sourire chaleureux.

« Yosh, j'suis Skye Tanner, Lychnis en 7e année, mais tu peux te contenter de Skye. T'es le nouveau, n'est-ce pas ? »

Droit au but, comme dirait les supporters d'un célèbre club de football.

Des rumeurs à Alcea Rosea, il en avait découvert beaucoup. Ce qu'il ne savait pas, c'était qu'il en était devenu une. Ses lentilles et son portable avait été un moyen de le reconnaître, en plus de son attitude parfois au summum de l'insouciance. Béni soit-il, depuis son arrivée, il n'avait pas eu besoin de se montrer sérieux. Rien de grave. L'école semblait calme en ce moment. L'apparence de celle-ci, c'était une académie d'élite, où les gens rentraient avec difficultés. Mais cette description était courte. Alcea Rosea était aussi le fief d'une organisation parallèle appelé Team Astria qui contrôlait l'école au travers de douze élèves qui formaient une ligue à l'échelle de l'école. Mais à ça, il fallait rajouter que la team Astria était plutôt dure et que ses représentants tenaient d'une main de fer l'école, une main qui n'était pas visible, mais qui était bien présente. Cette influence avait été rejetée par certains élèves qui formèrent l'organisation rebelle résistante : Mirage. Après un attentat à la bombe dans une salle de classe, tout semblait redevenu calme entre les deux partis. Du moins, son réseau d'information n'était pas capable de déceler la moindre interaction entre les groupes. Mais les sbires veillaient au grain et quiconque était suspecté d'aider Mirage avait de grande chances de se faire torturer, ce qui faisait écho à une sombre et lointaine époque. Malgré tout, les fausses dénonciations ne semblaient pas nombreuse, mais il pouvait se tromper. Il connaissait deux des chefs de la team Astria. Kenji Yamada, Spiraea. Plutôt sympathique, il se demandait réellement pourquoi ce dernier faisait-il parti de cette organisation, mais la réponse était probablement les avantages.

Quelqu'un vint s'asseoir devant lui avec un plateau repas, mais il était perdu dans ses pensées. Le second chef de la team Astria qu'il avait rencontré était Riley Tsuchimiya. Menthae, 15 ans. Une intelligence mathématique de surdouée et un caractère fort et incisif, mais pas réellement méchant dans le fond, du moins le croyait-il. Ses motifs étaient clair : elle ne respectait que l'intelligence et pour elle, il y avait pas mal d'abruti dans le coin. Il avait réussi à lui démontrer au moins partiellement le contraire. motifs était côté de cela, il avait rencontré des pions gris sur l'échiquier... Des élèves normaux et qui étaient pour la plupart, des gens agréables et sympathique. Tiffany Ravenswood, Narcissus, dans la quinzaine, nouvelle comme lui ... En beaucoup plus discrète. Sharon Rainsuave. Lychnis, jeune demoiselle, dans la quinzaine. RAS. Mikuo A. Amatsuki, Menthae, la quinzaine, RAS, si ce n'est qu'il était timide lui aussi... Il déplorait son manque de prise de contact avec Mirage, mais il fallait s'en douter. Ils se cachaient, car la team Astria les cherchaient... Et c'était sûrement pas pour discuter de la pluie, du beau temps et de pacifisme. Moins d'une semaine pour réunir toutes ces informations. Il se balançait sur sa chaise, l'écran de son téléphone portable se reflétant contre ses yeux, relisant ses notes. Il soupira et le referma. Quelque chose l'avait sorti de sa lecture vorace de ses propres annotations. Il posa la tranche de son portable contre le front en se balançant en levant les yeux au ciel. Qui pourrait faire partie de mirage ? Oh, c'était vraiment tout bête. Les Spiraea étaient les plus proches de rejoindre ce groupe. Puisqu'il fallait être soit très sympa, soit vouloir se la jouer héros. Et dans les deux cas, ça convenait parfaitement à Mirage. Il ferait de plus amples recherches plus tard se dit-il en continuant de se balancer avant de reposer ses pieds sur le sol pour voir qu'une fille était là.

Châtains, mi-longs arrivant à la nuque avec de longues mèches, lisses. Des yeux de couleurs brunes. Un visage plutôt enfantin. Elle était plus petite quelque lui, quelque chose comme vingt à vingt-cinq centimètres. Corpulence frêle ... Plutôt jolie. En fait, très mignonne. Son portable désormais placer sur son nez, laissant ses yeux voir la jeune demoiselle s'étant assise à sa table avec un plateau conséquent. Qu'avait-elle dit ? Il cligna plusieurs fois des yeux, ses longs cils trônant au-dessus de ses yeux aux bleus intense s'abaissant et se relevant plusieurs fois. Elle l'avait saluée, puis présentée ... Septième année, comme lui. Lychnis. Skye Turner... Attends, elle venait de l'appeler le nouveau ? L'espace d'une demi-seconde, il fit la moue avant de se reprendre et de lui sourire :

▬ Salut, je suis effectivement le nouveau. Kamijō Atios. Le second est mon prénom. Je le précise, car les gens ont tendance à confondre. Je suis comme toi en septième année chez les Spiraea. Tu vas bien ? Ah au fait, bon appétit. Petit à petit, on commence à s'attaquer à son ramen avant de reposer ses baguettes et de réfléchir. Finalement, il se décida : Eh... Bon, t'es la troisième fille à qui je le dis en moins d'une semaine, mais toi aussi, tu es très mignonne. Mais non, je ne te drague pas. Je suis sincère pour les deux.. Il pouffa de rire. Non, il ne cherchait rien en disant cela, il ne faisait que lui dire ce qu'il pensait. Désormais, il le précisait à chaque fois qu'il faisait un compliment à une fille. Comme quoi, de nos jours, les compliments doivent réellement se faire rare.

Pour une fois, l'intuition bien caché de Skye s'était avérée juste : le garçon avec lequel elle partagerait son repas ce midi était bel et bien le nouvel arrivant à Alcea Rosea, Kamijō Atios. Elle le regarda avec amusement scruter son portable d'un air sérieux puis rapporta son attention sur le plateau rempli qu'elle venait tout juste de poser. Nouilles, riz, légumes en tous genres et pâtisseries délicieuses remplieraient son estomac ce midi ; d'un geste souple, elle s'empara de la paire de baguettes soigneusement posée aux côtés de son assiette, lança un Bon Appétit joyeux à Atios et entama à vive allure son bol de riz blanc soigneusement sélectionné. En plus d'être un estomac sur pattes, la Tanner avait aussi la mauvaise habitude d'engloutir littéralement ses repas : en d'autres termes, elle mangeait — ou dévorait, à vous de voir — sa nourriture à une vitesse impressionnante, et ne prenait aucun gramme superflu à cause de cette manie entêtante. Son rassasiement joyeux fut alors interrompu lorsque son voisin reprit la parole entre deux bouchées. Tu es très mignonne. La réaction de Skye ne se fit pas attendre : ses joues s'empourprèrent, et ses jambes se mirent à fouetter l'air — un de ses vieux signes de nervosité — sous la table avant qu'elle ne puisse faire quoi que ce soit. Bon, d'accord : son air enfantin et adorable lui avait toujours valu des remarques de ce genre. Mais de là à aborder le sujet dès la première conversation ... Ce type avait de l'audace, elle ne pouvait pas le nier.

Mais la jeune fille était lunatique, et quelques secondes après ça, elle se remit à engouffrer les restes de son repas comme s'il s'agissait de son unique rassasiement du mois. Au bout d'une dizaine de minutes, pendant lesquels les deux adolescents ne s'étaient pas décrochés une seule parole, elle reposa ses baguettes et soupira de soulagement en voyant les plats vides soigneusement empilés sur son plateau. Elle leva la tête et regarda d'un air curieux Atios ; bien qu'il fût en train de déjeuner, la Tanner remarqua que son portable n'était jamais très loin de lui. Les rumeurs disaient donc vraies : le brun était inséparable de son téléphone. Et il fallait bien avouer qu'un tel comportement intriguait fortement Skye. Cette dernière possédait elle-même un cellulaire, qu'elle utilisait à bon escient pour harceler son frère dès qu'elle en avait l'occasion ; mais jamais, ô grand jamais, elle n'aurait pu être dépendante d'une telle machine. Sa curiosité maladive finit alors pas emporter le peu de bon sens qu'elle possédait : elle se releva, mit ses deux mains sur la table et se pencha vers Atios ; leurs visages n'étaient plus qu'à quelques centimètres de distance.

« Ca m'regarde sûrement pas, mais ... Pourquoi es-tu toujours collé à ton portable ? »

Tout ce qu'on pouvait dire, c'est que l'adolescente n'y allait pas par quatre chemins. Consciente de son manque flagrant de tact, elle esquissa un sourire chaleureux et sortit de la poche de son sweat un paquet neuf de Pocky au chocolat. Skye avait pris pour habitude d'acheter, chaque matin, une boîte de sucreries quelconque afin de soulager ses petits creux en cours de journée. Ses petites dépenses, à ses yeux insignifiantes, finiraient pourtant par faire souffrir son cher argent de poche ... Broaf, il était bien trop tôt pour s'occuper des conséquences. Elle ouvrit délicatement le paquet, et extirpa une friandise qu'elle cala à la commissure de ses lèvres et tendit le paquet en direction du garçon.

« T'en veux un ? »

(bon, je suis pas très fière de moi, mais j'étais légèrement à court d'idées. j'espère que ça t'ira. èè)

Où était la limite ? Où était la zone où la réalité se séparait et où ses mots créaient une illusion ? Jusqu'où quelqu'un de l'extérieur pouvait tenter de plonger avant de se faire perdre par les courants ? Hum... C'était naturel de chez lui de donner une carotte aux gens pour qu'ils détournent les yeux de la vérité. Il avait toujours camouflés ses véritables intentions, ses objectifs les plus secrets, sa véritable personnalité. Il était fort d'apparence, il intimidait les autres mêmes, mais au fond, peu importe comment la coque est adamantine, tant que le coeur et l'intérieur sont en verre, un coup bien placé au bon endroit peut casser la machinerie. Cette métaphore résumait tellement bien Atios qu'il était facile de répondre à la question cité plus haut. Il ne laisserait personne approcher de son véritable lui. Parce que les rapports sociaux impliquaient la possibilité de souffrir... Se rapprocher des autres, c'est être blessé et blesser ... C'est pourquoi lui, il ne blessait pas et se protéger des blessures en s'éloignant fictivement des gens, en plaçant les bonnes barrières trompes-l'oeil. Ainsi, il était seul, mais il ne pouvait pas souffrir d'autres choses .. Il pouvait rendre heureux les autres en émulant une amitié qui n'était pas totalement vraie ni fausse. Shakespeare à un jour dit que chaque homme, femme sur terre étaient des acteurs sur une grande scène ... C'était d'autant plus vrai pour le nouveau à Alcea Rosea. Il portait un masque extrêmement solide. Il était un menteur et un manipulateur, mais le genre d'acteur qui jouait les tragédies, pas le genre d'acteur qui sourit quand son masque tombe. Il ne faisait jamais rien de mal, mais en définitive, se rendre compte qu'on ne connait qu'un masque, ce n'était pas agréable...

Et le porteur du masque mangeait avec une certaine retenue comme quelqu'un venant de la haute société ... Ce qu'il était mais sans la prétention.. Oui, il mangeait avec des baguettes à la perfection, forcément, son "père" ne supportait pas les fourchettes. Donc il avait appris à se servir des deux. Un bon vieux bol de ramen tout simple à la viande, cela lui avait manqué mine de rien. Et le steack qui l'appelait depuis tout à l'heure ... L'appel du steack ! Depuis quand n'en avait-il pas eu ? Arf. Garder ses manières alors que ses yeux violaient du regard le steack qui finirait dans son gosier tôt ou tard. Une partie de son cerveau restait toujours sur la réaction de Skye qui avait brassé l'air sous la table de ses jambes, tapant sur ses tibias alors qu'elle rougissait de son compliment. Forcément, petite table, le jeune homme avait des jambes plutôt grandes, expliquant sa taille ... Des mouvements trop brusque et soit lui se retrouve à faire du pied, soit l'inverse. Mais elle avait reprit rapidement la dévastation de son plateau repas Alors que son portable s'était mis à vibrer. Il l'ouvrit et le referma en soupirant. Mais soudain. Un bruit. Elle se penche en avant. Ses yeux se collent aux siens. Il cligne plusieurs fois des yeux, la bouche entr'ouverte; Il ne réagit plus. Leurs souffles s'entrechoquent. Elle était trop proche. Il ne réagissait pas, mais elle était trop proche de lui. Pas de moue. Il ne détestait pas ça. Mais il n'aimait pas ça non plus. Pourquoi était-elle si proche de lui, soudainement ? S'il faisait un mouvement de travers, leurs visages se rencontrerait. Il devint aussi calme qu'un serpent. Il attendit, pendant de longues, mais peu nombreuses secondes, l'explication.

▬ Ca m'regarde sûrement pas, mais ... Pourquoi es-tu toujours collé à ton portable ?

▬ Hein ? Dit-il, surpris, face à face avec la jeune fille. Toutes les tables autour les regardaient, parce qu'ils étaient collés pratiquement de nez à nez. Mais la pression redescendit au niveau de ses tempes, car elle repartit en arrière pour sortir de ses poches un paquet de ... Mikado ? Mais c'était écrit Pocky dessus. Elle lui en proposait un ... Là, tout de suite alors qu'il venait à peine de finir son bol de ramen ? Il soupira : Si l'offre tient toujours après que j'ai fini de manger, pourquoi pas. Pour ce qui est de mon portable, vient de ce côté si ça t'intéresse.

Il ouvrit son portable et alla sur la page de son site internet. Celui de son groupe. Il rentra rapidement son mot de passe sans qu'elle ne puisse le voir et rentra sur l'index des chats.

▬ Je parle simplement à mes anciens amis de Céladopole, tout simplement. Dit-il... En faisant un semi-mensonge.

La belle-mère était fourbe, aigrie, mal-aimante, menteuse. Une langue de vipère, qui crachait injure sur injure à la figure des jumeaux ; une paume de fer, qu'elle écrasait avec énervement sur la joue des bambins ; et puis ce regard hautain, duquel elle dardait d'un air supérieur les doux enfants de son cher mari. Madame Tanner n'avait jamais aimé Ethan et Skye, question de principe ; une dame digne de son nom ne pouvait se permettre d'éprouver la moindre once d'affection pour des "bâtards" issus de l'adultère honteusement arboré par la famille. Néanmoins, un accord mutuel entre le couple avait conclu à ceci : les enfants ne devaient pas savoir, du moins pas pour l'instant. Alors Madame mentait. Ses excès de colère subites et ses fourberies incessantes, véritables fléaux de sa douce vengeance, étaient constamment justifiés par des pseudo-bêtises de la part des jumeaux, de la plus sérieuse à la plus loufoque. Malgré ses tentatives désespérées pour éliminer de son esprit toute trace de cette femme, l'adolescente se souvenait parfaitement des crasses qu'elle avait bien pu lui faire subir. Ses tendres pommettes se rappelaient encore de la paire de baffes magistrale qu'elle s'était prise le jour où, par malheur, elle avait osé briser une vieille assiette en perdant l'équilibre après s'être pris les pieds dans un sac mal rangé. Mais tout cela n'était qu'un prétexte pour faire souffrir les jumeaux ; et ça, les concernés le savaient parfaitement. Une réflexion mutuelle leur avait permis de découvrir le pot-aux-roses de la matrone et accessoirement, avait forgé leur capacité à reconnaître une personne sujette au mensonge. Bien que cette période soit définitivement révolue et soigneusement rangée dans un coin sombre du cerveau de Skye, elle avait conservé sa capacité à reconnaître une tromperie.

Son analyse était catégorique : Atios ne lui disait pas la vérité.

La tête au-dessus de son épaule, elle regardait d'un air curieux le portable du garçon. A première vue, son explication semblait tenir la route : un simple chat, sur lequel postaient à intervalle régulier un bon nombre de personnes. Mais un drôle de pressentiment tiraillait les méninges de la jeune fille : elle ne pouvait pas se résoudre à penser que le garçon se contentait de discuter tranquillement avec de vieux amis. Elle ne pouvait néanmoins pas exprimer ses doutes. Pas maintenant. Son expérience avec sa belle-mère lui avait appris à ne pas démentir le mensonge d'une personne aussi simplement ; si Atios ne souhaitait pas lui donner la nature de ses vraies occupations, il avait forcément une raison. Ainsi, Skye se contenta de hausser les épaules et de retourner bien sagement à sa place ; sa main glissa vers son cher paquet de Pocky, et elle s'empara d'une des friandises qui, quelques secondes plus tard, disparaissait entre ses fines lèvres. Alors qu'elle s'attaquait à un nouveau bâton chocolaté, son regard glissa sur l'horloge digitale accrochée au mur du Réfectoire. Il n'était qu'une heure de l'après-midi ; son prochain cours n'avait lieu que dans soixante minutes. Elle avait encore le temps de grignoter un peu ... et de faire connaissance avec Atios, accessoirement.

« 'Fait, t'as quels Pokémon sur toi ? »

Skye plaça ses deux coudes sur la table et cala son menton contre ses poings fermés. Ses yeux, pétillants de curiosité, fixaient le brun avec insistance, tandis qu'un petit sourire malicieux avait germé sur sa bouche. Les Pokémon, voilà bien un sujet sur lequel elle était intarissable. Et elle était bien curieuse de savoir quel animal Atios avait reçu à son entrée dans l'académie ...

Ces yeux. Les yeux de Skye Tanner étaient emplis d'une constellation qu'il pourrait reconnaître parmi mille. Celles du doute. Elle était donc moins naïve qu'elle ne le laissait pensé ... Peu importe. Qu'elle ne le crût pas était une chose. Qu'elle devinât son passé en était une autre, cette fois-ci totalement impossible. Même Alcea Rosea n'avait rien sur lui ; sauf qu'il était un étranger fils par remariage du PDG de Kamijō Corp. Son père et sa famille ignorait elle aussi, les dangers qu'il avait pu affronter, les épreuves qu'il s'était infligés et son statut du gang le plus répandu de Céladopole. Et c'était mieux ainsi. Il préférait qu'on le prenne pour le gentil et sage garçon, un peu fantasque, original et qui transpirait la joie de vivre que de celui du jeune homme solitaire qui passait son temps à aider les autres ou à les manipuler. Il ne le savait pas, mais tôt ou tard, l'échiquier géant qu'était devenu l'école, allait lui apparaître dans toute sa splendeur. Les blancs, Mirages, en échec, les noirs, Astria, les dominants. Et lui, le roi bleu, au milieu des pions et du champ de bataille. Il serait happé dans le maëlstrom des luttes intestines pour diverses causes, louables ou non. Il ne le savait pas encore, mais son étude impersonnelle des forces en présence serait troublée. Le spectateur, pourtant discret, finirait acteur, au milieu des deux feus et serait sûrement celui qui assumerait le poids de chacun pour les réunir, comme il l'avait toujours fait, quitte à en pâtir et à se sacrifier au passage. Oui, il n'était pas à Spiraea pour rien. Il était du genre à s'impliquer tellement fort pour les autres qu'il en souffrait au passage. Tout ça pour des sourires sur un maximum de visage...

Il se battrait encore seul. Il ne le savait pas, mais ne refuserait pas ce que le destin lui imposerait. Il serait sûrement confronté au danger. Serait sûrement utiliser par les deux camps. Il finirait sûrement agent triple. Mais comme le disait son réveil... Il devait toujours accélérer plus vite. La jeune fille était partie se rasseoir en face de lui alors qu'il se mit à commencer son steack qui l'avait attiré avec tellement de force depuis tout à l'heure. Puis, vint le tour de la part de tarte au flan. La fille en face de lui, continuait de grignoter ce qui semblait être des Mikado japonais. Qu'allait-il faire cet après-midi ? Le tournoi approchait à grands pas, il devait le garder en tête ... Demain, il n'irait pas en cours et irait s'entraîner et chercher un autre dragon pour sa collection. Ces pensées mises-à-part, il était rare de voir quelqu'un d'assez futé pour douter de ses mensonges. Lui, il avait toujours vécu dans le mensonge. Sa famille parfaite était un mensonge. Sa relation amicale avec son père était obviously un mensonge. Les encouragements de ce dernier pour qu'il profite de sa jeunesse, aussi ; un mensonge pour que lui, profite de sa mère. Son arrivée ici et son envie de changer d'air, aussi. En fait, son environnement n'était que mensonge. Malgré sa franchise et sa spontanéité, il restait un menteur qui vivait en connaissant les mensonges des autres. Il mentait à tout son entourage concernant son bonheur. Il mentait à tout son entourage concernant son passé et ses capacités. Il mentait. Même à cette fille si gentille. Et elle, avait dû vivre en subissant les mensonges de quelqu'un pour pouvoir lire le sien. Il l'imaginait, elle ne doutait pas de son explication, mais c'était une intuition... Celle que l'on a que quand on s'est rendu compte qu'on nous a menti pendant de très longues années.

▬ Un Solochi. Et un Natu. Et toi ?

Les souvenirs reviennent au galop. Lentement, sûrement, inlassablement. Une pensée effleure votre esprit, et voilà toute une foule de souvenances qui prend alors le contrôle de votre cerveau ; noyé par ce flux incessant de réminiscences, il flotte, et transporte sa douce détentrice dans un songe qu'elle n'aurait jamais aimé rencontrer de nouveau. Nous sommes en 2000 ; Skye, d'un air mélancolique, fixe les fines gouttelettes de pluie qui glissent le long des fenêtres. La fatigue, la froid et le manque de chaleur tiraillent ses pensées ; mais elle tient bon, subit en silence la punition de sa chère belle-maman. Être séparée d'Ethan est sûrement le détail le plus douloureux de l'affaire : après tout, Madame Tanner avait pour habitude de briser le duo formé par les jumeaux lors de leurs nombreuses sanctions communes. Son doigt glisse contre la vitre embuée ; elle se met alors à dessiner les premiers symboles qui lui viennent à l'esprit. Mots, Pokéball et smileys divers prennent forme sous le glissement de son index ; et enfin, alors qu'elle semble plongée dans son occupation, la porte s'ouvre dans un tel fracas que l'enfant sursaute. Sa matrone apparaît dans l'encadrement, haut-perchée sur sa haute paire de talons. Elle regarde sa "fille" d'un air hautain, lui indique d'un geste singulier la sortit et retourne vaquer à ses occupations. La petite se lève d'un bond, se précipite vers la pièce principale et fond dans les bras de son frère, libéré lui-aussi de la pièce dans laquelle il était enfermé. C'était comme ça à chaque fois.

« Un Solochi. Et un Natu. Et toi ? »

Skye, alors plongée dans ses pensées, fit un bond de surprise avant de supprimer d'un revers de manche les larmes naissantes au coin de ses prunelles brunes. Décidément, se souvenir de cette période ne lui réussissait pas du tout ... Tout en essayant d'adopter l'air le plus jovial possible, elle sembla réfléchir, et prit finalement la parole.

« J'avais déjà un Wattouat en arrivant, et l'académie m'a offert un Axoloto. »

Elle s'étonna d'avoir adopté un ton aussi sérieux en disant cette phrase. Gênée, elle détourna le regard d'Atios et se mit à fixer le vide, la joue calée contre un de ses poings. Son flux de pensées divagua sur ses cours de l'après-midi : qu'avait-elle, déjà ? Elle n'en avait pas la moindre idée. Ou peut-être n'avait-elle même pas cours, après tout. Elle n'en savait strictement rien ; sa mémoire avait tendance à lui faire gravement défaut lors de telles situations. Skye s'autorisa finalement à piocher une nouvelle fois dans son paquet de Pocky, soigneusement posé au centre de la table, et le fit lentement glisser vers le brun : penser à sa feu belle-mère avait réussi à mettre fin à son appétit légendaire. Tant de mauvais souvenirs la dégoutait, lui faisait prendre conscience de l'horrible face de la société. La bulle rose dans laquelle elle s'enfermait constamment ne lui servait que de protection face à la dure réalité de cette vie ; mais ça, elle ne s'en était pas encore rendue compte. Elle se décida enfin à reconcentrer son attention sur Atios : son visage n'affichait qu'un simple sourire neutre, qu'elle n'arborait qu'en de très rares occasions.

Elle était persuadée qu'il avait remarqué ses larmes, tout à l'heure.

Atios avait fini de manger son plateau alors que skye semblait se perdre dans ses pensées (ou ses souvenirs, il lui était impossible de le dire.) Elle qui semblait si vive, pleine de joie de vivre, un véritable soleil couleur Lychnis, se retrouvait ici bien terne. Pas comme un magnifique couché de soleil qui vous réunit entre amoureux, mais plutôt comme un ciel plein de nuages gris se posant devant ce magnifique et doux soleil... Il en profita pour aller déposer son plateau vide sur la chaîne qui conduirait celui-ci aux agents d'entretiens pour procéder à la saine activité de la vaisselle et revint s'asseoir en silence. Elle semblait penser à quelque chose de particulièrement triste... Mais plutôt que triste et souffrante, elle semblait surtout triste et résignée, ce qui était toujours pire que simplement triste... Résignée à souffrir ... De quoi pouvait-elle bien réfléchir avec tant de sérieux elle qui semblait l'antithèse même du sérieux ? Elle s'était métamorphosée en peu de temps, assez pour que le jeune homme aux yeux bleu et que sa curiosité soit titillée au point où il voulut en savoir plus. Mis à part ça, elle avait vraiment un joli visage... Le genre de visage qui vous fait penser à une peluche. Non, elle n'avait pas une tête d'ours, mais une tête qui vous donne envie de lui faire un gros câlin, d'autant plus qu'elle semblait malheureuse en ce moment. Bien entendu, ils ne se connaissaient à peine et enlacer une fille que l'on connaît depuis moins d'une heure devant tout le monde dans un réfectoire, juste parce qu'elle est trop mimi et qu'elle vous rend un peu triste de la voir malheureuse, ce n'est pas quelque chose de faisable. Du moins, pas si vous avez un minimum le sens des réalités. Il devrait être plus fin pour trouver un moyen de lui remonter le moral. Il posa ses coudes sur la table et ses doigts se joignirent pour former une plate-forme où il cacha son nez derrière, ne laissant que son regard lui aussi en pleine réflexion.

Elle s'essuya deux petites larmes de façon fortement peu discrète, ou du moins, elle ne parvint pas à lui cacher sa tristesse profonde. Elle lui répondit, mais mettez un visage teintée par les larmes sur un air jovial et vous aurez l'expression de Skye à ce moment-là. Impossible pour elle de lui dissimuler ses souffrances. Il ne fallait être sorti d'une grande école pour se rendre compte que quelque chose de fort, au plus profond de la jeune fille, rongeait celle-ci et lui dévorait le coeur assez fort pour causer ce soudain changement d'humeur qui la fit parvenir aux larmes. Il était assez facilement déductible que si elle avait été seule, elle n'aurait pas retenue ses larmes. Atios était stoïque et ne montrait rien, mais au fond de lui, il était réellement désolé, malheureux pour la jeune fille. C'était idiot, mais quand on était plein d'empathie, on ne pouvait s'empêcher de sentir la douleur des autres et de la faire sienne, de vouloir substituer la victime de cette émotion pour se sauver soi... Il n'avait pas changé de posture. Que devait-il faire pour l'aider ? Le pouvait-il seulement ? Ils venaient de se rencontrer, ce n'était donc pas un ami de cette dernière, avait-il le droit de prendre la place d'un ami sans son accord ? Sa respiration calme et mesurée, battant tel un métronome, la mesure du temps qui s'écoulait, était la seule chose qui, avec la respiration de la jeune fille aux cheveux châtains clairs et les élèves du réfectoire, ce qui brisait le silence qui s'était installé. Il devait trouver quoi dire et quoi faire. Sinon, la chance de l'aider pourrait partir. Comment s'y prendre ? Avait-il assez confiance en lui pour foncer ? Elle ne semblait pas du genre à être sur la défensive... Pourtant, il ne savait pas s'il devait oser ou non l'approche. Approche à la fois hypocrite, discrète et sincère... Allez. Il n'avait rien à perdre. Même lui pouvait être un de ces personnages principals de Drama...

Il se leva brusquement de la table vide et fit un sourire chaleureux. Il remit son sac en bandoulière et pris le paquet de pocky dans la main avant de se saisir de sa main droite de la main de la jeune fille et de l'aider à se lever. Il lui dit en souriant : ▬ On ne va pas prendre racine ici ! Suis-moi ! On va faire un tour si tu veux ! Je sais où je veux aller ! Me feras-tu l'honneur de me suivre et de m'accompagner cette après-midi ?

Ce jour-là, Skye avait renoué avec un désespoir qu'elle n'avait pas atteint depuis bien longtemps. Son entrée à Alcea Rosea avait sonné le glas d'une nouvelle vie où ses mauvais souvenirs ne devaient rentrer, du moins en principe ; et jamais, ô grand jamais, elle n'aurait cru se faire rattraper par son passé d'une telle manière. Le sourire plein d'entrain qui habitait constamment ses lèvres s'était volatilisé pour laisser place à un rictus peu convaincant, qui ne collait pas du tout à la personnalité si jovial de la Tanner. Cette dernière ne pouvait détacher son regard des prunelles bleues d'Atios : elle y cherchait un réconfort, une étincelle de douceur qui aurait bien pu apaiser sa tension. Néanmoins, toutes les tentatives du brun pour lui venir en aide auraient été vaines, elle le savait parfaitement ; Ethan lui-même n'aurait pas pu effacer la peine qui avait alors élue domicile dans son esprit. Mais, quelque part, sa présence à ses côtés la calmait. Elle était la seule à pouvoir porter ce fardeau, mais ne vivait pas cette traversée des enfers en solitaire : il était lui, lui et son sourire chaleureux. Il était un sale menteur, mais devait sûrement avoir ses raisons. Peut-être avait-il eu une enfance aussi misérable que la sienne ? Ou pas. Elle n'en savait rien, et ne désirait pour l'instant pas le savoir. Ses pensées n'étaient accaparées que par une chose : la fuite. Adieu, idées noires : Skye voulait retrouver la lumière.

Et Il pouvait faire réapparaître cette petite étincelle perdue.

Un hoquet de surprise. Alors qu'elle s'y attendait le moins, la Tanner sentit la main du garçon se posait sur la sienne et tirer sur son bras ; corpulence faible oblige, elle se retrouva sur ses pieds en un rien de temps, un air déboussolé inscrit sur le visage. Elle écouta les dires d'Atios ; ses joues se teintèrent de rouge. Il voulait l'amener quelque part ? Pourquoi elle ? Elle n'en savait trop rien. La pression qu'il exerçait sur sa main ne l'aidait pas vraiment à réfléchir ; mais, bizarrement, elle trouvait cela agréable. Elle qui n'avait connue que la poigne brûlante de son frère s'étonna de trouver celle d'un étranger aussi douce et chaleureuse. Elle se détendit un peu, relégua une partie de ses pensées dans les profondeurs de son subconscient. Et enfin, elle répondit.

« D'accord. » Un sourire naquit sur son visage. Un vrai sourire. « Je veux bien t'accompagner. »

Elle serra la main d'Atios, accentua son sourire. Se libérer l'esprit.

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