Le froid mordait. Et faisait mal. Sous son gilet, elle frissonnait, n'ayant pas prévu dès le petit matin une telle température transpercante. Il faisait de ce temps qui titillait les nerfs, lorsqu'une journée de soleil en annonce trompeusement une suivante, et une journée de pluie également. Autrement dit, hier elle avait trop chaud, aujourd'hui elle a trop froid. En plus de cela, elle était de ce genre de personne à se faire surprendre à chaque fois.

La neige tombait. Et brouillait la vue. En petites touffes qui voltigeaient lentement au dessus de sa têtes. Seulement un instant, entre le ciel et la terre, ces flocons furent individuels, chacun parcourut son chemin. Pour finir ensemble au sol, dans cette généralité si emmerdante qui leur enlevait leur originalité. Elle lève ses yeux d'encre vers le ciel. Préfère les observer voltiger, que s'écraser.

Le ciel était gris, vide de lumière bienveillante, en plus de l'heure tardive qui annonçait le proche couché de soleil. Celui-ci ne s'était pas montré de l'après-midi. Autant dire que se mettre près des fenêtres, en cours, n'avait servis à rien. Ce sentiment de claustrophobie féroce qui montait en elle lorsque ce genre de situation se produisait, commençait sérieusement à se faire ressentir.

Bouger, aurait été une bonne solution. Se lever de son banc à moitié couvert de neige. Faire quelques pas au rythme de la musique farouche qui battait à ses oreilles depuis une dizaine de minute. Cela aurait été une bonne solution. Mais depuis peu, elle en avait trouvé une autre, à ce genre de problème trop énervant. Elle sort sa clope, tire sa taffe. Relève ses yeux, observe sa fumée. Celle-ci se mélangeait étrangement avec la buée qui sortait du bout de ses narines glacées. Impossible de les différencier, elle se contente donc de les observer se lier pour mieux s'envoler vers les nuages. Elle aspire une autre bouffée, se cale au mieux sur la planche de bois mal entretenue, resserre l'étreinte de ses bras autour d'elle et celle de l'écharpe autour de son cou qui montait jusqu'à son menton. Peut-être arrivera-t-elle à vaincre le froid, ainsi. Mais cela ne marche qu'un instant seulement. Sa clope se termine, la musique s'arrête, la fumée ne s'envole plus. Le rêve disparait.

Elle soupire, éteint les braises dans la neige qui n'a pas complètement ensevelit le banc. Observe celui-ci, et ses messages anonymes mal gravés d'anciens élèves, qui avaient certainement passés bien plus d'années qu'elle ne pourrait le deviner. Elle s'apprête à s'en aller, quand un mouvement silencieux de l'autre côté d'une haie l'arrête. Septique, elle ne bouge pas d'abord. La dernière chose qu'elle voulait, était bien de rencontrer une tierce personne. Encore plus si elle la connaissait, et donc si elle devait faire la discussion. Sourire, chercher un sujet de conversation. Elle reste un instant sur le banc, partagée entre l'envie de s'enfuir et la curiosité. Elle observe, comprend, et sourit en voyant un bout d'objet non identifier bleu, se déplacer. Un Axoloto qui vole ? Impossible. Sauf pour un. Un seul.

Furtivement, elle se lève, suit le mouvement qui semble se diriger doit vers les serres. Y entre à sa suite. Le bâtiment laissait la faible lumière traverser les innombrables fenêtres, et éclairer d'une façon assez étrange l'atmosphère poussiéreuse qui y régnait. Les rayons lumineux étaient maintenant bien plus visibles, sous cet air lourd. Elle ne vas d'abord pas plus loin que le bas de la porte, observe le jeune homme continuer tranquillement son chemin. Elle ne le voyait que de dos, mais n'avait plus aucun doute quant à l’identité du blond.

Elle se penche doucement et rassemble silencieusement de la neige dans ses mains. C'est sur la pointe des pieds qu'elle continue sa route, la boule de neige bien sagement posée entre ses doigts frais. Elle le regarde patiemment examiner sommairement quelques plantes, s'intéresser à d'autres. Il était drôle à voir, comme une enfant curieux qu'on balance dans l'antre des mystères. Mais pas assez pour arrêter la Lychnis dans son élan. Elle s'approche dangereusement du jeune homme, le surprend. Lui balancer la boule glacée dans le dos. La réaction de celui-ci est à la hauteur de ses espérances. Il sursaute, cri, trébuche et s'écrase à terre. Ryüko ne peut se retenir. Elle lance sa tête en arrière, comme chaque fois qu'elle éclatait de rire. L'air ébahit du blond ne l'aide pas à reprendre son sérieux.

- Le sol, c'est dur.

Et la neige, c'est froid. Deux vérités générales qu'elle ne connaissait que trop bien, pour les avoir expérimentées de nombreuses fois. Elle tend tout de même une main compatissante pour l'aider à se relever, bien que ses yeux ne cessent de pétiller de fierté, ravie d'avoir réussie son coup. Elle ne cesse de sourire en continuant toute innocemment sa route, les mains maintenant glacées bien enfoncées dan ses poches. Elle s'arrête au bout de quelques pas, près d'un spécimen de plante qui l'émerveille depuis toujours : la rose. La serre était un bâtiment dont elle avait entendue parler, mais jamais elle n'avait eu l'idée d'aller y faire un tour. Pourtant, l'endroit était plus qu'agréable, calme et reposant. Tranquille. C'était le genre de milieu qui emporte loin des remous de la vie à l'académie d'élite. Loin des problèmes inutiles qui pourrissent le moral.

- Tu aimes les fleurs, maintenant ?

Elle est curieuse de savoir depuis quand le blond s'intéresse à la botanique. A sa connaissance, il est plus pokémon eau que jardinerie. Elle le voyait mieux dans un lac que dans une forêt, bien que son Axoloto semblait loin de se plaindre. Cependant, elle était heureuse de rencontrer le jeune homme en cet instant. Depuis plusieurs jours, tout se cassait la gueule. Ses projets, ses sentiments, son avenir au sein d'Alcea, rien n'avait jamais été aussi flou. Loin d'elle l'intension de lui confier quoi que ce soit. Mais avoir un mélange de naturel et de distraction lui était toujours bénéfique. Comme un second horizon. La chose qu'elle redoutait le plus au monde, après avoir une bonne raison de s'inquiéter pour sa jumelle, était peut-être de ne pas savoir ce qu'elle voulait. La seule chose dont elle avait besoin, était de se défouler, de courir au loin, frapper des gens. Ou de sa clope. Ou de cette simplicité apaisante que le blond ne cessait de lui inspirer. Bien que pour rien au monde elle ne l'avouerait.