Encore une soirée qu’elle passait dans la bibliothèque, dans cette étrange salle, remplie d’immenses étagères aux innombrables livres, après ses cours. Elle n’était pas là par pure plaisir, du moins, pas officiellement. Non, si elle errait dans ces longues et silencieuses allées, en poussant une sorte de chariot à roulette, c’était parce qu’elle s’était trompée à un cours. Elle avait donné une mauvaise réponse au professeur Leak, qui avait eu la malicieuse idée de lui attribuer un gage, au hasard. Et elle avait écopé d’une semaine à s’occuper de la bibliothèque. Et elle adorait ça ! Parcourir les allées, remettre les livres en place, s’occuper d’eux, les entretenir… Oui, on pouvait presque dire qu’elle prenait son pied à arpenter ces couloirs, à découvrir, chaque jour, de nouvelles choses. Elle investirait probablement les lieux, un jour, de façon plus sérieuse…
En tout cas, les gérantes de l’endroit qu’elle avait rencontré ne semblaient pas contre de l’aide. La Menthae avait parfois l’impression de s’activer toute seule, mais au bout de deux jours, elle avait compris le système et le fonctionnement du rangement des livres. Qui plus est, elle n’était pas si seule puisqu’Hibana l’aidait. Si, au départ, les bibliothécaires n’étaient pas enthousiastes à cette idée, et lui reprochaient son Pokémon en liberté, ils avaient vite compris que non seulement la souris était attentive à ses gestes pour ne pas faire de dégâts, mais qu’en plus, elle doublait l’efficacité de l’adolescente. La Négapi l’aidait à atteindre les livres en hauteur, et elle savait aussi repérer les livres à déplacer, car mal rangés. Elle était une deuxième paire d’yeux redoutable, et ses petits éclairs savaient calmer les élèves qui pourraient faire du remue-ménage. Non pas qu’ils aient particulièrement peur d’elle –bien que le rongeur était convaincu que c’était le cas- mais ils devinaient à ses joues crépitantes qu’elle n’hésiterait pas à les attaquer si besoin était. Et s’ils venaient à riposter, le bruit serait fort et dérangeant pour les élèves studieux, et les gêneurs finiraient dehors. Car en étant punie ici, Willow avait acquis l’avantage d’être un minimum protégée des perturbateurs.
Elle poussait son charriot, rangeant les livres avec attention. Elle semblait couver les livres, les aimant tous, à sa façon. Elle ne connaissait pas toute la bibliothèque par cœur, mais d’ici la fin de la semaine, ça serait le cas, et elle savait déjà orienter les élèves dans certaines directions. Elle était utile, et elle en était fière. Elle finissait de ranger des livres dans la section botanique, lorsqu’elle aperçut sa Pokémon qui lui demandait de se rapprocher d’une étagère. Elle s’exécuta et la petite créature bondit sur le meuble, grimpant tout en haut. Elle aperçut un lourd livre répertoriant tous les types de baies et leur mode de culture qui dépassait du rayonnage. Elle commença à pousser dessus, pour le ranger correctement, mais le bougre objet résistait. Elle eut beau forcer pendant cinq minutes, elle n’y arrivait pas. Et sa dresseuse était trop petite pour l’atteindre et l’aider. Frustrée de cet échec, la souris sauta sur l’étagère dans face, qui était vide, prit de l’élan, et bondit, fonçant droit sur le livre. Elle percuta la tranche de tout son poids, et le livre finit par rentrer dans le rang, comme les autres. Malheureusement, de l’autre côté, il y avait une autre rangée de livres. Et en poussant comme une forcenée sur le gros manuel, elle en avait fait tomber trois plus petits de l’autre côté. Et au vu du bruit de l’impact, et des quelques cris qui s’en suivirent, ils avaient dû chuter sur quelqu’un.
Aussitôt, Willow abandonna son charriot et quitta le rayon pour aller dans celui d’à côté, sa Négapi retournant sur son épaule. Elle s’avança vers la personne qui était seule dans ce rayon-là. Elle ne vit que brièvement la personne en face d’elle, s’étant déjà inclinée pour présenter ses excuses à l’inconnu.
« Pardon ! Je… Je suis désolée… je… C’était un accident, nous ne voulions pas… vous importuner… »
Elle garda la tête basse et se mit à genou pour ramasser les trois ouvrages, au sol. Puis, tout en restant accroupie au sol, pour ne pas afficher ses joues écarlates sous la gêne, elle demanda, timidement.
« Je… Je peux vous aider à… à quelque chose… ? Je… Je connais bien la bibliothèque… maintenant… Si vous cherchez quelque chose je… je peux vous aider, si vous le désirez… »