Comme tu l'avais imaginé, ce test n'avait pas été à la hauteur de tes attentes. Enfin, en ce matin, tes attentes se résumaient uniquement en une question répondue par oui ou par non ou des dessins. Autant dire que tu n'avais pas confiance en tes chances d'exceller, mais tu savais parfaitement que tu t'en sortirais. Parce que tu t'en sortais toujours. Puis, durant ton examen, tes pensées se tournaient vers l'occupante de ton lit. "J'ai longtemps cru que les pokémons valaient beaucoup mieux que le commun des mortels."avait-elle dit avant de sombrer dans les bras de Morphée. Était-ce mal d'encore le croire? En était-elle venue à la conclusion que c'était faux? Peut-être qu'elle n'était pas passée par le même chemin que lui, aussi.

Enfin, maintenant que le tout était terminé, tu en profitas pour regarder ta montre. Treize heures vingt. Était-elle toujours là? Tu en doutas forcément, mais pris une chance. Pourquoi pas lui repayer son café avec un truc à manger? La bouffe du réfectoire suffirait probablement et c'était bien le seul truc dans tes moyens. Même toi, encore assommé par la fatigue, tu ne voulais pas d'un truc trop lourd. Ainsi, tu optas pour le neutre, soit deux cafés et deux croissants jambon fromage. Si elle était toujours là, tant mieux. Si elle était partie, tu avais également ton repas du soir. Pratique, non?

En entrant dans le dortoir, quelques personnes te saluèrent, auxquelles tu répondis brièvement, tout droit en direction de ta chambre. Tes Pokémons, conscient de l'endroit où ils se trouvaient décidèrent de sortir de leur prison, courant un peu partout au grand dam des surveillantes qui avait abandonné l'idée de te punir pour ce que tu faisais depuis sept ans à présent. Déjà plus jeune, tu ne les gardais pas dans leur Pokéball et des années plus tard, la seule chose qui avait changé était le fait que tu en avais deux de plus. Les mains pleines, tu t'excusais sommairement, le sac contenant le repas pour deux tenu par ta bouche, livres et cahiers dans les deux autres mains, visiblement dépassé par la situation. Une fois devant la porte, tes pokémons l'ouvrirent et détalèrent dans toutes les directions, retrouvant leurs coins favoris.

-Attenchion les gars, peut-être qu'elle dort encore!

Visiblement non, puisque le lit était vide, au plus grand plaisir de Zap qui se dépêcha de sa faufiler sous les couvertures tandis que Cornetto opta pour se mettre en boule sur ton oreiller. Gordon rejoignit son perchoir et Masa continua de faire des singeries sur tes épaules. Tu pus enfin déposer tes affaires sur ton bureau alors qu'un bruit provenant de la salle de bain attira ton attention. Comme quoi, elle était toujours là.

-Ah tiens. Je savais pas si tu serais toujours là, mais je t'ai apporté à manger ainsi que le café que je te redevais. Noir, c'est ça?

Une grimace de dégoût se forma sur ton visage alors que tu imaginais le goût du café sans rien pour l'adoucir. Tu poursuivis avec une autre question, qui te trottais en tête depuis ce matin, d'ailleurs.

-Ils sont où tes Pokémons? Ils vont s'ennuyer si tu les laisses seuls trop longtemps... Non pas que je veuilles que tu partes ou que ce se soit...

Et voilà, les discours ambigües commençaient. Il te faudrait quelques heures de sommeil pour retrouver l'habileté d'avoir des discours cohérents.

Vêtue comme une princesse, une idée saugrenue traversa ton esprit, que tu chassas aussi rapidement qu'elle était venue. Mais pendant une seconde, une longue seconde, tu en vins à songer à quel point elle concordait bien avec les Spiraea. Apparemment la demoiselle n'avait pas trop mal dormi. Mieux encore, elle s'était habituée à cet habitat naturel masculin qui, tu étais certain, laisserait sans doute bien des gens sans voix. Du coup, tu étais bien rassuré de voir qu'elle ne s'était pas enfuit, prenant ses jambes à son cou dès que la chance lui étais donnée. Ce que ça voulait dire pour toi? Que ta première impression, bien que douteuse (pour faire changement, tiens), ne l'avait pas laissée hostile, à la limite indifférente, ce qui en somme constituait déjà un point positif à tes yeux. Puis, elle acceptait tes maigres offrandes avec gentillesse, délicatesse, si tu pouvais oser l'usage d'un tel mot. Autant d'observations en si peu de temps, très certainement plusieurs d'entres elles étaient erronées. Mais tu penserais bien ce que tu veux. Puis, alors que tu prends place sur ton siège de fortune, c'est-à-dire ton bureau de travail que tu avais balayé sommairement du revers de la main, tu l'observes, mâchant machinalement ton propre croissant, détectant ses moindres gestes tandis qu'elle venait prendre place sur ton lit pour entamer elle-même son repos. Sa remarque provocatrice provoqua un rictus de ta part alors que tu l'intimes au silence en plaçant ton index devant elle et termines ta bouchée en vitesse.

-Non non non! Jamais je ne te mettrai à la porte. D'ailleurs, juste le fait que tu sois encore là est positif pour moi...Enfin, je me comprends.

Car elle, elle n'aurait sans doute pas cette chance, de te comprendre. Tentative de drague mal orchestrée? Non, tout de même pas. Mais de voir qu'elle ne s'était pas sauvée à l'anglaise après ton départ montrait que tu n'avais pas manqué ton coup et qu'elle pourrait peut-être apprendre à te connaître pour vrai. Dans une situation normale? Tu te racles la gorge et poursuit.

-Je voulais dire, que tes pokémons allaient forcément s'ennuyer, si loin de leur maîtresse.

Et elle l'a dit. Ils étaient bien présents, seulement dans son sac. Comment pouvait-elle les laisser si longtemps dans un si petit espace? Les tiens n'auraient jamais pu supporter ce calvaire plus de deux heures. Elle vient dire qu'ils ont un fort caractère? Mais tu ne l'écoutes pas, oh non. Tes yeux la fixent d'une intensité presque perverse, un large sourire fendant ton visage. Oh oui, tu allais le faire et elle ne t'empêcherais pas. Au diable la galanterie, dans le pire des cas, ce serait le bordel? Mais ce l'était déjà!

D'un bond presque félin, tu sautas de ton semi-perchoir, laissant ton déjeuner à la portée d'une petite araignée qui semblait trouver le tout plutôt de son goût. Alors que tu atterris au sol, face à son sac, tu fermes les yeux et fouille à la recherche de ses pokéballs, déballant déjà tes excuses à la pauvre Sayuri.

-Tu aurais dû me le dire plus tôt! Je sais qu'on ne fouille pas dans le sac d'une fille, mais c'est pour leur bien! Aucun Pokémon ne peut rester si longtemps dans un si petit endroit! Excuse-moi, mais je fais ça pour toi!

Alors seulement, tu mis la main sur ce que tu cherchais. D'un geste presque théâtral, tu les lanças en l'air, impatient de voir ce qui pourrait en sortir. Ils ne devaient pas être bien gros, non?

Est-ce que tu t'attendais à ça? Pas du tout. Mais pourtant, tu n'étais pas déçu de voir quel genre de dresseuse cette Sayuri s'avérait être. Pas qu'une petite dresseuse, d'après ce que tes yeux pouvaient observés. Assis dans un coin de la pièce, en tailleur, tes pokémons vinrent te rejoindre sans un mot, tout aussi impressionné que tu pouvais l'être toi-même. Ironiquement, ceux-ci tenaient sans problème sur toi. Mais ça, c'était des géants. Étrangement, tu ne semblais pas tant affecté, ni même surpris de voir ces colosses d'évolution. En fait, tu ne l'enviais pas du tout. Tu te complaisais dans cette zone de confort, où tes pokémons sont plus faciles à transporter, câliner, même. Cependant, cela te donnait un air plus faible vis-à-vis certains dresseurs, elle par exemple. Tu devais donc composer avec l'effet de surprise, Statitik étant le premier à démontrer que la taille ne veut rien dire du tout.

-Wow. Je savais pas que tu avais des pokémons si imposants. Au moins, je sais que je n'ai pas à douter de tes talents de dresseuse en aucune façon!

Ta main se perdit dans tes cheveux alors que cette scène de ménage pour le moins inusité avait lieu dans ta propre chambre. Ainsi donc, la jeune femme avait raison quant à leur fort caractère. Seulement, les tiens faisaient uniquement des bêtises. Le fort caractère résidait dans leur indiscipline. Eux, c'était vraiment des têtes fortes prêtes à tenir tête à leur propre dresseuse. C'est un peu ce que tu redoutais. Qu'ils viennent à discuter tes choix, tu aurais de la difficulté avec cela. Tu voulais conserver une confiance absolue en eux et inversement. Enfin, peut-être qu'elle vivait le tout différemment.

Statitik quitta ton épaule, comme absorbé par l'Elektek, le pokémon électrique. Tu n'en fis pas toute une histoire, laissant la jeune lui présenter ses compagnons, un rire discret perturbant ton visage impassible lors de la mention du caractère trouble de l'oniglali. Tu tournes ton visage vers Sayuri, ajoutant d'un air joueur.

-J'en conclus donc qu'avec une telle équipe, tu t'avères être une adversaire coriace? Du moins, beaucoup plus menaçante que les miens!

Si pour toi c'était du second degré, tes pokémons, eux, ne le virent pas de cette façon. Tous sauf le Statitik te martelèrent de petits coups, te forçant à tomber à la renverse sous les coups de pattes et de becs. Une fois leur vengeance assouvie, tu te releva, rectifiant le tout.

-Je retire ce que j'ai dit...Ils...peuvent se montrer intimidant à leur façon, eux aussi...

Zap, lui, poils hérissés, sauta tout droit sur l'Elektek, cherchant à absorber son électricité statique. Tu savais le pokémon amateur de tout ce qui génère de l'électricité, mais de là à s'en prendre à un autre Pokémon. Quoi qu'avec sa grandeur, cela ne devait pas être bien dérangeant. Tout de même, tu rappelas le petit vampire vers lui.

-Ne fait pas ça! Reviens ici avant de te retrouver dans le pétrin...

Piteuse, l'araignée revint te rejoindre, sans quitter le pokémon humanoïde des yeux. Tes yeux revinrent donc se planter dans ceux de la jeune femme.

-Même s'ils sont imposants, je préfère savoir qu'ils ont une certaine liberté plutôt que d'être enfermés dans une pokéball. Je ne juge pas ta manière de faire. Je comprends que tu ne voulais surtout pas déranger. En tout cas, je n'aurais pas ta délicatesse. Pour certains, ils sont uniquement des créatures à entraîner. Pour moi, j'aime croire qu'ils valent plus que cela...

Un regard plus nostalgique, à présent. Plus bas, tu murmures doucement, un sourire de déception accompagnant tes paroles.

-...Je parle pour moi je sais, mais c'est les seuls qui me n'ont pas abandonné jusqu'à présent.

Tu te secoues la tête rapidement, beaucoup plus paisible malgré le brouhaha.

-Alors, que faisons-nous, à présent?

Pendant quelques minutes le monde s'arrêta. Il n'y avait que le calme plat, suivit de la voix calme et posée de Sayuri qui emplissait ton esprit, celui-ci décortiquant et analysant chaque parcelle d'information qu'elle t'offrant, pour au final afficher une erreur majeure dans ton cerveau. Incapacité à comprendre ce qu'elle disait ou du moins, à l'intégré à ta personne. Tu avais espéré, oh oui, espéré l'espace de ces courtes secondes interminables qu'elle s'arrête à sa première phrase. Mais plus elle continuait, plus tu comprenais à quel point vous étiez dans deux mondes différents, à quel point elle était supérieure à ta propre personne. C'était blessant. Bien sûr, c'était magnifique pour elle, une chance qu'elle se soit sortie de son marasme. Mais ta pensée égoïste revenait toujours à ta propre personne. Tu avais espéré, oh oui, espéré pouvoir comprendre ce dont elle parlait, mais force t'étais de constater que ce serait impossible.

Et tu restas dans cette position quelques instants, un air figé et absent au visage, avant de finalement émerger de cet état transe, le sourire masochiste de celui qui se complait dans son propre malheur au visage. Comme si de rien n'était (et Dieu que tu pouvais être bon lorsqu'il s'agissait de faire comme si de rien n'était), tu réponds simplement un:

-Tant mieux si tu as des personnes à qui t'accrocher! C'est ce qui compte après tout, non?

Bon, lorsqu'on ne sait pas de quoi on parle, ça sonne toujours un peu faux, mais après avoir vécu par transposition, tu savais à peu près ce que cela devait faire. Tu écoutes sa proposition avant d'acquiescer sans hésiter, préférant quitter l'endroit et laisser tes pokémons s'amuser au soleil en cet après-midi.

-Bonne idée! Je m'occupe du divertissement!

Sonnant l'alerte, tes pokémons impatients se mirent à sautiller partout, attendant que tu daignes ouvrir la porte pour les libérer de la prison rectangulaire. Seul Statitik opta pour ton épaule en guise de locomotion et, attrapant ton étui à guitare, fis signe à Sayuri de te suivre à l'extérieur.

-Je connais l'endroit parfait, suis-moi!

Les jardins des Spiraea avaient certainement un cachet unique dont plusieurs aimaient profiter, y compris les élèves extérieurs à la maison. Tu trouvas rapidement le lieu de prédilection, une table cachée sous un arbre, à l'abri des rayons meurtriers de l'astre diurne. Tu laissas tes pokémons libre de leurs actions, mais tu savais qu'ils n'iraient pas bien loin. Ouvrant ton étui, tu sortis ton bien le plus précieux, l'attachant en bandoulière autour de ton corps avant de lever les yeux vers ta compagne du jour.

-Es-tu musicienne dans l'âme, Sayuri? Ou une artiste tout court? Pour ma part, il s'agit de mon seul héritage...

Positif ou négatif? La réponse était compliquée et puis la mélodie commençait déjà. Tandis que tes doigts répétaient ces accords machinalement, visiblement habitués à répéter les mêmes notes encore et encore, tu observais l'action de tes amis, levant les yeux de temps en à autre vers la demoiselle pour t'enquérir de ses réactions, si réaction il y avait.

Une silence qui dura plus longtemps que tu ne l'avais prévu, durant lesquelles tu avais posé ta main à plat sur ton instrument, coupant court aux vibrations et mettant fin la douce mélodie sur le point d'atteindre un autre niveau. Tu avais écouté les paroles de Sayuri certes, mais jamais n'avais-tu imaginé qu'autant de personnes se seraient arrêtées pour te regarder jouer...et t'applaudir. Alors là, un malaise s'introduit en ta personne alors que systématiquement, tu fuis le regard de la foule qui se dispersait, rangeant ta guitare pour leur faire comprendre que c'était terminé, la performance gratuite. Tu poses ton coude sur la table avant d'appuyer ta tête contre ta main et pianote des doigts en fixant la menthae, considérant une réponse potable. L'art de manier les mots? Pourquoi pas? Certaines personnes trouvaient que dormir était un art, alors bon...

-Mais si, enfin je crois. L'art c'est tellement subjectif, qu'à peu près tout ce qui demande une maîtrise peut en faire partie non? Donnes-moi un exemple!

Des bruits de dispute et entre les deux sandwichs posés sur la table, une boule beige roulant à toute allure suivi d'un singe lançant cri par-dessus cri. Tout juste le temps de sauver le café de la demoiselle d'une mort certaine. Pourtant, devant les bêtises intempestives de ces deux rigolos, tu ne pouvais qu'avoir un regard bienveillant, doux. Ils s'amusaient, comment leur en vouloir? Dire que certains dresseurs réprimandaient ce genre de comportements. Ridicule. Enfin, ton attention se porte à nouveau vers la demoiselle.

-Enfin, je me suis mal exprimé. J'ai dit que pour moi la guitare c'était un art, mais c'est surtout un exutoire. Si je te disais qu'au fond, je n'aimais pas en jouer, est-ce que tu me croirais?

De lui dire ça t'avais surpris toi-même. On dirait que tu cherchais à te faire décoder, qu'elle te prenne en pitié. Venant de toi, c'était à peu près l'équivalent d'échapper soi-même son savon en prison et de se pencher pour le ramasser. C'était idiot et douloureux. Tandis que tu prends enfin une bouchée de ton sandwich (décision prise devant le regard très revendicateur de l'Étourvol perché sur l'arbre au-dessus de toi), tu lèves les yeux vers la jeune femme et change le sujet, espérant masquer ta déclaration qui t'apparaissait comme inconfortable, à présent.

-Ils sont comment les gens de ton entourage? Tes amis, co-chambreurs, ta soeur, même? je veux dire, pour avoir une vision si néfaste de l'Homme auparavant, ils doivent vraiment être des gens bien, non?

Malgré le regard affamé que tu portais à ton repas, tu restais intéressé à écouter Sayuri expliquer quel genre de gens elle fréquentait. Peut-être était-ce tout ce qui te manquait dans ta vie. Des gens bien. Pour sûr, Rex restait le seul exemple potable d'ami qu'il te restait, sauf que ses défauts sont aussi pire que les tiens. Seulement différents.

-Sans doute. Mais c'est bien plus compliqué que ça.

De toutes les questions existentielles et plus ou moins spirituelles, c'était une des seules à laquelle tu n'avais pas de réponses, du moins pas que tu puisses formuler de manière cohérente avec des mots. C'est bête, mais tu sentais que c'était nécessaire. Pour ne pas oublier d'où tu viens, ne pas oublier qui tu es. C'est l'héritage familial et en tant que mélomane accompli, ton art se devait de passer par cette douloureuse réminiscence d'un passé loin d'être glorieux. Ce que tu qualifiais d'art n'était rien de plus que ton habileté à positionner tes doigts sur les frettes de la guitare, il va sans dire. Tu n'avais pas envie d'embarquer dans un discours interminable et très peu intéressant, à priori. Puis, comme le silence est d'or, tu sentais qu'il valait mieux partager cette richesse et te concentrer sur ce qu'elle avait à dire, elle.

Après tout, vous n'étiez peut-être pas si différents que ça. Une enfance qu'on ne peut qualifier de facile, surtout lorsqu'on ne peut s'appuyer sur le concept de famille, faute d'en avoir une vraie. Comme elle, tu as été séparé de tes géniteurs, ce qui, sur le coup ne t'avais pas déplut, mais aujourd'hui, peut-être échangerais-tu quelques coups supplémentaire contre une enfance normale? Tandis qu'elle, privée de son enfance pour être plongée dans le monde de l'ironie et du sarcasme, ces briseurs de rêves et de candeur juvénile. Tandis qu'elle dressait un portrait de son tuteur, tu t'étonnas de voir à quel point les apparences étaient trompeuses. Quoique par cette même logique, tu devrais être une personne à problèmes toi aussi. Tu ne pus t'empêcher de commenter là-dessus, de manière presque amusée.

-Juste avec la description que tu lui donnes, j'ai peine à imaginer qu'il a réussit à élever une enfant en jolie jeune femme. Disons que je me serais attendu à mon monstre de sarcasme. Et beaucoup plus de rides.

Les compliments franchissaient rarement la paroi buccale mais quand ils le faisaient, c'était bien parce que tu le pensais. Qu'importe si c'était inapproprié ou dans tous les cas, très peu subtil car tu assumais pleinement ce que tu disais. Quand on te décrit un vieux grincheux, tu t'attendais à un truc dans la mienne lignée, quelques tentacules en prime. Enfin, tu la laissas continuer, parler de sa soeur jumelle, ce à quoi tu ne trouva rien d'approprié à ajouter et ses amis. C'était amusant de constater les similarités et les différences de chaque point de vue. Mis à part le fait que tu n'avais pas de famille à qui t'identifier, tu aimais néanmoins les amis que tu avais et surtout leurs défauts. Ça te donnait un point sur lequel t'identifier, tes qualités étant bien plus difficiles à cerner que tes mauvaises manies. Mais surtout, cela te permettait de te sentir au même point que tous les autres.

Enfin, elle termina son laïus, sans retourner la question. Ce geste te fis sourire, peu importe s'il était volontaire ou non. Car cela te laissait croire qu'elle avait appris sa leçon, qu'elle ne retirerait rien de bon de ta part à ce sujet. Sur le coup, ça t'as plu. Beaucoup même. Bien sûr, tu n'y allas pas de ton plein gré. Tu laissas le silence s'installer un moment, laissant mijoter toutes les informations mijoter dans ta tête, mais lui posa ultimement une seule question.

-Quand tu regardes ça, aujourd'hui. Es-tu contente de ton cheminement jusqu'à présent, ou aurais-tu mieux aimé que ce soit différent?

Tu n'espérais pas vraiment une réponse, seulement qu'elle médite là-dessus. Enfin, cherchant quelque chose de plus sain que de ruminer le passé, tu lui demandas la suite des événements.

-Comme je t'ai offert logis et un repas tout à fait gourmet, tu choisis la suite des événements. Je t'avertis, si on en fait à ma tête, on va se retrouver à faire la sieste et je doute que c'est ce que tu souhaites.

Tu supposais qu'il était facile de s'adonner à des activités lorsque tu avais eu une nuit de sommeil convenable. C'est-à-dire, dans un lit et pour plus que quatre heures. Tu n'allais pas caché que ce qui te tenait debout n'était nul autre que le pouvoir de la caféine et tel un junkie, tu savais que tu ne ferais pas long feu sans une dose supplémentaire très prochainement. Voilà pourquoi l'option de la sieste te convenait plus que parfaitement. Une léthargie quasi-totale pour un regain d'énergie et de quoi terminer sa journée sans être trop amorphe. Mais, par pure bonne volonté, tu laissas la chance au coureur (surtout parce que tu avais eu l'audace de penser qu'elle irait dans la même direction que toi).

Erreur, surtout que tu étais dans une dispute avec le sport depuis une bonne partie de ta vie. Mais la préfet des Menthae semblait partager un lien plutôt affectueux avec la sueur et la fatigue musculaire. Un brin masochiste, il allait sans dire. Normalement, tu n'aurais rien dit, tâchant de ne pas juger les gens sur leurs goûts parfois discutables, mais lorsque cette même idée discutable t'impliquais, tu croyais avoir ton mot à dire là-dedans. Cette fois, c'était un non catégorique de ta part. Mais quelque chose te disais qu'il valait peut-être mieux essayer, que tu pouvais arrêter à tout moment, de toute manière. Ce devait être le compliment précédent qui t'avais eu. Incertain, tu lui partageas tes inquiétudes face à une telle activité.

-Je doute que ce soit pour moi, ça! Enfin...pas aujourd'hui.

Mais elle avait parlé en même temps que toi et ton orgueil de mâle se refusait à laisser passer cette chance. Comme quoi tu n'avais pas vraiment ton mot à dire, finalement.

-Je suppose que je n'ai pas le choix, hein? C'est bon, je vais te suivre. Mais ne me fait pas trop souffrir sinon je ne te parle plus jamais.

Des fausses menaces pour agrémenter le tout. De tous les scénarios possibles, une chose était certaine, tu dormirais tôt ce soir et ce, pour très longtemps.

-Les pokémons viennent avec nous ou non?

Un regard sadique vers tes pokémons qui eux, lancèrent un regard réprobateur. Mais si tu étais pour souffrir, autant en faire une expérience collective.