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feat. Elias

Ces derniers temps, plusieurs souvenirs de mes premiers jours à Alcea Rosea m'assaillent quand je ne sache trop pourquoi. Je me souviens encore comme si c'était hier de mon étonnement devant la grandeur et la beauté du campus, moi qui avait pourtant fréquenté les meilleures écoles d'Unys. En me retrouvant pour la première fois devant la bâtisse principale, j'ai ressenti une bouffée d'humilité qui ne m'a pas fait de tort. Ici, personne ne se soucie de l'empire économique Astaran. Je ne suis qu'un numéro dans la file et je dois me battre pour préserver ma précieuse place. Oui, à mon arrivée je pensais encore que le monde m'appartenait. Dès que la cloche a retenti et que le flot humain m'a bousculé de toutes parts, j'ai réalisé ma propre insignifiance. Que vaut vraiment ce nom au fond? Rien du tout. Je n'ai rien de plus que les autres. Si je voulais briller, ici, faudrait alors que je prouve quelque chose. Dans ce nouvel état d'esprit, j'ai erré des heures dans les couloirs étroits, cherché mon chemin vers l'aile réservée à cette nouvelle maison dont je faisais maintenant partie et dont j'ignorais tout. J'avais beau me tourner dans tous les sens à la recherche d'une âme charitable, personne n'acceptait de m'aider. Qu'en avaient-ils à faire de moi après tout? Je représentais simplement une nouvelle compétition... Jusqu'à que Jade Collins apparaisse dans ma vie. Un vrai ange descendu du ciel. Elle qui m'a tendu la main alors que je commençais réellement à désespérer. Ma première amie ici. J'ignore pourquoi je repense sans cesse à mon arrivée à Alcea, mais j'ai ma petite idée. Cette pensée me redonne une force de me battre et de persévérer. Chaque fois que je me sens paresseux, ce souvenir revient me hanter avec son message clair: ta place ici n'est pas assurée, va donc travailler pauvre fou! Alors je m'active à nouveau.

Voilà exactement ce qui s'est produit aujourd'hui. Je suis parti au lever du jour, seul avec Elias, mon Poussifeu. Ensemble, nous avons pris le train en direction des montagnes. Nous avons escaladé la paroi rocheuse en se serrant les coudes. Cette montée périlleuse m'a écorchée de partout mais je m'en soucie à peine. Toujours, ce souvenir précieux vient me motiver à continuer. Plusieurs grottes nous attirent de leur pénombre béante, mais encore et toujours nos pas nous mènent loin au flanc de la montagne. Après de longues minutes d'escalade pénible, je trouve enfin l'ouverture que je cherchais: celle de la cavité volcanique. Ce trou coincé entre deux roches permet tout juste à un homme adulte comme moi-même de passer. Je dois me défaire un moment de mon sac à dos pour le lancer au-devant, en bon éclaireur. Elias, à mes côtés, piétine le sol de ses petites pattes, visiblement impatient de revenir à son lieu de naissance. Je lui fais signe d'entrer en premier, conscient que cela lui fera plaisir. Le Poussifeu jette un cri de joie avant de s'engouffrer dans la caverne. Avec un soupir amusé, je me lance à sa suite. En venant ici, j'espère recréer chez le Pokémon le même sentiment qui m'habite suite à la répétition de ce souvenir de mon arrivée à l'école. En revenant au point de départ, peut-être Elias y trouvera-t-il une source de motivation.

Je récupère mon sac et le jette sur mon épaule. Le petit poussin m'attend déjà au bout du couloir, le feu dans les yeux. Je le suis à travers ce labyrinthe. Chaque pas me fait souffrir d'avantage de la chaleur accablante qui règne dans l'endroit. Pourtant, je continue sans me plaindre. Cette fois, j'ai pensé à emporter un sac rempli de deux bouteilles d'eau, une serviette ainsi qu'un T-shirt propre. Pas question de rentrer encore une fois avec le chandail tout trempé. J'ai appris de mon erreur. Nous vagabondons pendant une quinzaine minutes dans les couloirs de la cavité avant de retrouver cette fameuse fourche rencontrée avec Nuki, le matin de la capture d'Elias. Sans hésiter, je m'engouffre dans le corridor de droite, suivi de près par le Pokémon feu. Je retrouve avec peu d'enthousiame cette ouverture étroite. Nous émergeons rapidement, heureusement, dans l'anti-chambre rocheuse où j'ai trouvé mon petit compagnon. Celui-ci se met à sauter dans tous les sens, heureux de se retrouver chez lui. Je le laisse revisiter son habitant naturel avant de le rappeler à l'ordre. Oui, il est temps de passer à l'action.

«Il est l'heure de s'entraîner, Elias!»

Le Poussifeu me rejoint, docile, l'air profondément joyeux. Nous passons la prochaine heure à nous entraîner. Le petit poussin commence par courir autour de la pièce afin de pratiquer sa vitesse qui ne cesse de s'améliorer dernièrement. Fier, je l'observe et l'encourage lorsqu'il le faut. Je lui lance ensuite quelques balles de tennis emportées avec moi afin qu'il les esquive. Les parois rocailleuses ajoutent un défi car le Pokémon doit composer avec les rebonds des balles sur celles-ci. Malgré tout, il les évite toutes sans problème. Une d'entre elles passe près de ses pattes. Sans crier gare, il lui jette un bon coup de patte qui l'envoie vers moi avec une force surprenante. Je dois me pencher à la dernière seconde pour l'éviter. Je me redresse, surpris, une main sur la poitrine. Il m'a peur le petit! Je ne l'avais jamais vu utiliser ses pattes ainsi auparavant. Bizarre. Elias éclate de rire voyant mon air déconfit. Je lui adresse une grimace avant d'éclater de rire à mon tour. Je me dirige vers lui, voulant le prendre dans mes bras, quand un éclair de lumière me force à me protéger le visage de mes bras. Je rouvres mes paupières closes afin de m'habituer à cette vive lueur avant de laisser mes membres retomber le long de mon corps. Mon Poussifeu a disparu. À sa place se tient une masse blanche lumineuse. Le forme s'agrandit devant mes yeux ébahis. Peu à peu, elle s'affine et se définit. Deux bras apparaissent, terminées par d'immenses griffes. Le cou s'allonge. Des pattes solides soutiennent maintenant un corps musculeux. Peu à peu, la lumière révélant des plumes aux couleurs orangées. Deux yeux où brillent une intense flamme me toisent intensément. Un Galifeu se tient maintenant devant moi. Je reste figé, le souffle coupé.

«Elias...?»

Le nouvel arrivant me fixe toujours, mais lentement, un sourire apparaît à son bec. «Gaaaaaali!» scande-t-il. Lentement, l'idée s'installe dans mon esprit. Je le reconnais. Il s'agit bien de mon bon vieux Poussifeu. Nous nous jetons dans les bras l'un de l'autre, émus de cette évolution. Je reste bouche bée devant cette transformation inespérée.

«Tu es génial, Elias!» je fais en serrant plus fort. «Félicitations!»

Ému et fier, je le relâche pour mieux l'observer. On dirait que ce retour à la case départ aura porté ses fruits.