Diane se retint de donner un coup de pied dans la porte de sa chambre, pestant contre des imbéciles qui lui venaient de l’accoster et foutre une bonne rouste toute en discrétion alors qu’elle se promenait loin du pensionnat. Elle ne toqua pas, ignorant si un élève du pensionnat ou un membre du personnel avait été assigné pour faire une ronde. De toute façon, elle n’était pas d’humeur pour vérifier si quelqu’un était là. La rousse avait besoin de souffler. Un coup de tonnerre traversa la pièce, la jeune fille avait claqué la porte avec virulence mais elle ne parvint pas à la refermer bien au contraire. La porte était complètement ouverte. Elle pesta et traversa la pièce en enlevant son haut noir, le jeta sur la table la plus proche et se dirigea vers le placard près de la fenêtre, placé juste près d’un coin de la pièce. Elle y sortit une trousse de secours après s’être abaissée. Il était hors de question pour elle d’aller à l’infirmerie, elle savait se soigner seule et était trop fière d’avouer que deux gamins avaient réussi à la blesser. Les rayons du soleil se diffusaient à travers le rideau crème et révélaient les ecchymoses présentes sur le dos et le flan gauche. Elle avait apparemment reçu quelques coups de poings bien placés. Son visage déformé par la douleur et la colère était resté intact pour ne pas attirer l’attention évidemment.

Elle marcha avec un peu de peine, tentant ne pas laisser le moindre cri s’échapper de ses lèvres et s’assit sur une chaise près son bureau de travail. Diane ne se préoccupait pas du tout de ce qui se passait autour d’elle. Ses blessures retenaient toute son attention. Elle ouvrit la boîte tant bien que mal, rien qu’un mouvement de bras, une inspiration la faisaient grimacer. Un oiseau siffla gaiement, ce qui fit tiquer la dresseuse dont la respiration battait de manière saccadée. Le sixième sens de l’animal avait du l’alerter car on ne l’entendit plus. S’empêchant de soupirer, elle enleva le bouchon d’un tube et y fit sortir un gel avec le plus délicatesse dont elle était encore capable, c’est-à-dire une énorme noisette qui ne demandait qu’à déborder de sa main tremblante. Cette fois l’étudiante laissa un juron s’échapper de ses lèvres, ce qu’elle regretta pour peut-être la troisième fois de sa vie. Elle se dépêcha de passer la crème apaisante. Au contact du froid, la rousse frissonna mais savoura le bien être qui remontait le long de son ventre tout en fixant le ciel à travers l’étoffe. A première vue, elle possédait une ecchymose dans le bas du dos, une sur le flan gauche et la dernière au niveau du diaphragme.

Pendant qu’elle réalisait ses propres soins, Diane s’interrogeait : elle n’avait rien fait pas même essayer de provoquer qui que ce soit mais on l’avait tout de même agressé. Etait-ce juste du à son appartenance aux Lychnis, la jalousie qu’elle soit devenue préfète ou autre chose de plus confidentiel ? Surement. Elle haïssait ce genre de comportement quelque soit l’être qui le réalisait. Mais elle ne préféra pas s’attarder dessus au risque d’exécuter la loi du talion, une loi qu’elle considérait comme pitoyable mais après tout, elle ne vivait que pour elle-même. Passant une deuxième couche de gel afin qu’il s’imprègne bien et la soulage le plus possible, la préfète leva les yeux au plafond et les ferma, n’esquissant plus le moindre mouvement. Le silence l’aidait à se calmer et ne plus penser à l’injustice, à l’ignorance et la connerie qui l’entouraient.

Un raclement de gorge se fit entendre. Diane l’ignora, focalisée sur ses blessures et se mordant les lèvres pour ne laisser échapper aucune plainte. Mais ses mouvements étaient limités elle ne pouvait donc pas appliquer sa crème correctement… Puis une main lui retira le tube des mains. La rousse se retourna vivement en alerte, pestant contre son insouciance. Elle aurait du fermer cette maudite porte mais sa colère et la douleur avaient détourné sa raison. La préfète fixa la nouvelle venue et fronçant des sourcils mais elle se tut profitant du fait qu’elle se faisait soigner et ce correctement. Elle ne dit rien, ni ne grognait quand elle sentait une décharge lui traversait le corps quand la crème était appliquée pile sur l’un des plus gros hématomes. Elle respirait calmement du moins essayait pour soulager un peu sa souffrance et préserver son calme.

Aucun mot ne fut prononcé jusqu’au moment où les soins se terminèrent. Diane pivota pour être correctement en face de sa bienfaitrice. La Lychnis eut le réflexe de pencher la tête sur le côté. Elle était perplexe. Etait-ce Sayuri avec laquelle elle s’entendait légèrement mieux ? Enfin si on pouvait dire cela ainsi. Toutes deux étaient juste quelque peu plus aimables… Mais cela ne pouvait être Sayuri… Cette dernière se promenait rarement dans les dortoirs Lychnis sauf lors des rondes nocturnes. Alors c’était surement… Ryüko Iwasuru, la sœur jumelle de Sayuri… Hé bah, heureusement que Diane savait réfléchir de temps en temps sinon elle aurait commis une bêtise. La rousse ne put s’empêcher d’être impressionnée par cette ressemblance entre jumeaux/jumelles. Si les deux sœurs se mettaient côté à côte sans rien dire, notre blessée ne pourrait jamais deviner qui était qui.

Diane reprit son tube de crème en tendant simplement la main et esquissa un sourire de remerciement. La préfète se redressa ensuite en grimaçant légèrement et s’inclina lentement :

« - Merci pour ton aide, Ryüko. »

Elle n’en dit pas plus préférant éviter de devoir répondre aux questions vis-à-vis de ses ecchymoses. Oh elle se fichait qu’on la jetât au bûcher d’avoir participé à une altercation physique alors qu’on connaissait sa réputation de bagarreuse. Diane savait qu’en tant que préfète elle risquait de se voir retiré ce poste. Mais que nenni elle n’en avait rien à faire même si elle n’en donnait pas l’impression en cet instant. Elle croisa les bras et tapota le sol, fixant sans être ostentatoire Ryüko avant d’aller fermer la porte, préférant éviter tout quiproquo et d’attirer l’attention par ses blessures. Puis elle désigna un siège demandant à la jumelle Iwasuru de s’installer puis se dirigea vers son petit frigo de chambre où elle en sortit du jus d’orange. Elle en versa deux verres et le tendit vers sa camarade Lychnis, ignorant si celle-ci était encore debout ou avait accepté l’invitation tout en prononçant d’une voix accueillante :

« - As-tu soif ? »

Puis elle ut une gorgée de la boisson avant de s’interroger. Ryüko était chez les Lychnis, serait-elle quelque peu différente vis-à-vis de sa sœur ? Il était rare de voir des jumeaux séparés à Alcea Rosea. Ce fut pourquoi Diane ne jeta pas Ryüko dehors. Elle se disait qu’elle n’avait pas à juger la personne qui l’aidait, bien qu’elle soit la sœur de Sayuri, personne dont elle avait encore des conflits. Mais la préfète savait pertinemment qu’elle se méfiait tout de même. Prudence est mère de sureté. Elle relança la discussion en remarquant une chose :

« - Ne devrais-tu pas être en cours ? »

Alors que le ciel de novembre se couvrait de nuages, atténuant la lumière présente dans la chambre de la préfète, cette dernière tentait au mieux d’éviter de trop bouger et de montrer la douleur toujours lancinante qui dardait le long de ses hématomes. Diane but une gorgée pour cacher cela, pour mieux se contrôler. Puis elle écouta tranquillement la réponse de Ryüko sans rien dire de plus sans chercher à lui faire la morale. Diane séchait elle-même les cours aujourd’hui, certes dans son cas c’était justifié mais elle le faisait quand même. La rousse était loin d’avoir l’image de la personne l’exemplaire et elle le savait. Ce fut pourquoi, elle se contenta d’hocher la tête, d’agiter la main pour dire qu’elle posait la question surtout pour converser un peu et d’esquisser un sourire malicieux. Ryüko avait de la répartie et Diane ne put s’empêcher de penser à Sayuri. Ah elle ne se permettrait pas de les comparer mais elle ne pouvait s’empêcher de voir la préfète Menthae chez sa sœur. Ah les jumelles étaient perturbantes.

Aucun bruit ne vint interrompre le jeu de regards entre les deux jeunes femmes, du moins presque. Un léger toc toc s’éleva à travers la chambre. Diane termina son verre en une gorgée et traversa la pièce tant bien que mal. Elle posa son verre en route et ouvrit la porte, sans se soucier de sa tenue. A l’embrasure de la porte se trouvait un autre Lychnis avec une lettre. Ce dernier vit Diane et sa tenue légère et se mit à rougir énormément ce que Diane ignora superbement, arrachant la lettre des mains de son camarade masculin. Elle le remercia rapidement en lui souriant et lui claqua la porte au nez. Elle jeta un coup d’œil sur l’enveloppe et la retourna pour voir son destinateur. Rien, Aucun indice. Elle leva les épaules, ne voulant pas réfléchir pour le moment et lança tel un frisbee la lettre vers son bureau. Ce geste provoqua un étouffement d’un cri de douleur tandis que le morceau de papier atterrit à destination non sans percuter la lampe de bureau. Diane reporta son attention sur Ryüko et sourit de manière contrite :

« - Excuse-moi pour ce dérangement. »

Diane baisse le regard pour observer ses hématomes, son visage se plissa de dégoût quand elle vit les dégats. Elle ne s’attarda pas dessus et s’avança vers l’Iwasuru et s’assit non loin d’elle et s’affala sur son lit. Elle fixait le plafond et brusquement sans prévenir se mit à parler d’un ton amical :

« - Quel est ton lien avec ta sœur ? Ce n’est que par curiosité. J’aimerais comprendre les liens entre jumeaux et jumelles. Ah attention, je ne vous considère pas comme bêtes de foire. Juste que j’aimerai aussi comprendre ce vous lie en tant que sœurs car j’ai beau avoir un frère, je ne sais pas ce qu’est une fratrie. »

Si Diane se plaignait ? Si Diane était jalouse ? Si Diane se souciait de l’image qu’elle avait auprès de Ryüko ? Si Diane cherchait à se confier ? Toutes les réponses étaient non. Elle voulait juste savoir et comprendre. Elle ferma les yeux un instant tentant de ne pas avoir de réminiscences de son passé et se redressa pour fixer la lettre sur le bureau tout en écoutant attentivement Ryüko.

Diane ne montra ni son étonnement face aux révélations de Ryüko, ni sa curiosité naissante à propos de l’histoire originale entre les deux. Même le plus imbécile des humains saurait qu’il ne s’agit pas d’une histoire anodine de savoir que deux sœurs jumelles n’ont pas vécues ensemble. Si elle allait critiquer l’envie de Ryüko de connaître Sayuri ? Jamais de la vie même si elle ne pouvait pas réellement comprendre cela, son vécu étant différent et opposé à leur situation. La rousse écouta avec attention et respect sa vis-à-vis sans commenter, la laissant parler. Si elle avait un avis à ce propos ? Pas exactement. Elle ne pouvait comprendre et donc ne pouvait pas se permettre d’avoir la présomption d’essayer d’imaginer la chose. Imaginer et vivre ne sont pas la même chose. Elle savait que ses sentiments vaincraient sa raison dans ce genre de situation. Elle ne savait pas non plus comment elle réagirait vraiment. Diane croisa les bras et se dirigea vers son bureau pour s’appuyer dessus et pour soulager la douleur qui la lancinait de plus en plus.

La préfète émit un sourire contrit quand elle entendit les confessions de Ryüko. Oui, elle ne pouvait pas comprendre ce que sa camarade ressentait. Elle ferma les yeux un instant pour ne pas penser à son frère ; à l’abandon de ce dernier. Diane éprouva cependant sans savoir pourquoi une certaine sympathie pour la brune. Elle la fixait toujours sans qu’aucun mot ne traverse ses lèvres, ignorant le chant de la pluie contre sa fenêtre. La jeune femme esquissa un sourire plus amusé cette fois quand elle entendit la hargne, du ton quelque peu incisif qui émanait de la dernière réplique de Ryüko. Comme Diane observait attentivement son interlocutrice elle put aisément suivre son regard qui semblait être concentré sur la fameuse lettre. Tiens Diane n’était pas la seule à être curieuse ? Intéressant, pensa-t-elle. Puis arriva une question qui dérangea fortement la rousse. Même si elle voulait l’oublier son frère arrivait à la hanter. Elle fronça fortement des sourcils avant de reporter son regard sur la jumelle de sa rivale.

« - Oui, un grand frère pour être précis. Si tu veux, physiquement, on se ressemble énormément. On peut dire qu’il est moi en version masculine. »

Diane s’appuya plus fortement le bureau mais les ecchymoses, bien que couvertes de crème lui rappelèrent à l’ordre. La préfète laissa échapper un cri de douleur avant de se mordre la lèvre inférieure. Elle se redressa pour se tenir droite comme un piquet avant de continuer sur sa lancée, les yeux toujours rivés sur Ryüko. Sa voix était marquée par une certaine rancœur :

« - Mon frère est parti, laissant ma mère et moi dans les griffes de mon géniteur. Je ne sais pas si c’est de la lâcheté de ne pas affronter mon père ou du courage d’avoir osé défier son autorité et avoir briser les barreaux de sa cage… Mais si j’ai un seul regret ce qu’il n’a pas pris ma mère avec lui…»

La rousse soupira et fixa alors le ciel assombri, les yeux illuminés par une tristesse qu’on voyait rarement chez elle. Elle, l’enjouée, elle, le phénomène, elle, le garçon manqué sur patte, elle craquait parfois. Diane inspira fortement serrant ses poings, prit la lettre qu’elle avait délaissée et l’ouvrit pour la lire. Il n’y avait qu’une phrase : « Retourne à la maison. C’est une question d’héritage. ». Diane frappa le bureau de son poing, une fois, puis plusieurs fois tout en roulant la feuille et la lançant sans s’en rendre compte vers Ryüko… Hors de question de retourner dans cet enfer. Jamais, au grand jamais, elle ne voulait revoir son géniteur…

Diane semblait se souvenir qu’à moitié la présence de Ryüko. Elle ne lui manquait pas de respect, elle était juste humaine, préoccupée par des démons qui ne la lâcheraient jamais, harcelée par des blessures encore ouvertes, encore saignantes. Mais elle ne voulait pas tourner cela au dramatique, enfin plus dramatique que la situation ne l’était. Elle s’était laissé aller mais elle n’était qu’un amas de sentiments enfermés dans une cage fragile qui venait de se briser. Oh, cela ne virait pas non plus à la tragédie. De toute façon, ce n’était pas des larmes qui coulaient sur son visage mais une vague de colère intense, retransmises dans ses poings qui parvenaient à recouvrir quelque peu les gouttes d’eau qui martelaient les vitres de la chambre. Diane y jeta un coup d’œil assassin n’appréciant pas que le temps se moquait d’elle et décrivait que trop bien son état d’esprit.

Une main chaleureuse la toucha. Ses poings arrêtèrent de frapper la table, les jointures rougissantes. La rousse releva vivement le visage, fixant sa camarade d’un regard insondable mais intense. Elle se retint de la prendre par les épaules de la secouer et de l’enlacer dans ses bras. Elle avait encore assez consciente de ce qui l’entouraient. Mais elle ne dit rien et se laisser faire, la mâchoire trop crispée pour permettre aux mots de sortir. Elle desserra ses mains et essaya de se détendre tant bien que mal… Ses épaules s’affaissèrent peu à peu comme si elle ne voulait plus combattre ce poids qui martelait son corps. Elle soupira et continua d’observer Ryüko comme si voir son visage lui permettait de se focaliser sur autre chose. Puis elle se surprit, dans son désemparement, remarque des petits détails qui différenciaient les deux jumelles Iwasuru. Mais elle n’en fit pas la remarque.

Elle tapota de sa main libre le haut de la tête de la Lychnis brune à la fois pour rendre le sourire sur le visage de la jolie brune mais aussi pour se rasséréner elle-même. Puis elle décida sur un coup de tête de relâcher la pression par un truc bête. Elle prit Ryüko dans ses bras et déposa son visage dans le creux de son coup et respira son léger parfum. Elle était faible mais tanpis elle avait besoin d’une présence. Tanpis pour sa fierté. Pour une fois, elle s’abandonna à la première personne, qu’importe qu’elle ne le connaissait pas. Diane voulait juste souffler et avoir une épaule sur laquelle se reposer enfin. Mais on ressentait facilement encore son stress. Son corps était horriblement tendu et les blessures ne faisaient qu’augmenter son image fragile. Mais cela, la préfète n’était plus à cela près et avait même oublié qu’elle était blessée malgré la douleur qui la tiraillait.

« - Excuse-moi pour ce geste. Mais j’ai besoin de juste quelques secondes et désolée de t’affliger ce genre de mélodrame. »

HRP : Désolée pour le temps de réponse, la réponse qui ne fait pas avancer le rp mais je voulais faire court et pouvoir te libérer de notre rp qui traîne un peu éè.