Il était tôt ce matin là. Le soleil entamait à peine sa lente traversée du ciel, arrosant les jardins de ses rayons dorés. Il restait encore, derrière les nuages, la trace argentée de la lune, son contour perceptible seulement pour celui qui prenait la peine d'observer. Il faisait frais, aussi, et les plantes brillaient de la douce rosée, tombée un peu auparavant. Les gouttes perlaient au bord des feuilles, minuscules larmes étincelantes, perles de vie. Une légère brise agitait les arbres et faisait danser les brins d'herbe, rafraîchissant encore cette atmosphère matinale.

De légers bruits de pas vinrent perturber le silence paisible, des pas d'enfant. Nayle frissonna sous sa veste et resserra son écharpe autour de son cou, soufflant à l'intérieur pour se réchauffer. Il était rare qu'elle soit levée si tôt mais dérangée par elle ne savait trop quoi, elle s'était réveillée sans pouvoir se rendormir ensuite, à son plus grand dam. Peu désireuse de rester au lit toute la matinée, puisqu'elle n'avait pas cours ce jour là, elle s'était donc habillée chaudement et son petit sac en bandoulière battant ses côtes, elle était sortie se promener.

Elle s'arrêta dans un endroit qui lui semblait un peu plus à l'écart, préférant rester dans cette tranquillité silencieuse pour le moment, même si elle se doutait que peu de personne avait eu l'audace de se lever aussi tôt qu'elle. Elle s'assit à même le sol, dans l'herbe, et sortit ses trois Pokéballs de son sac en les alignant parfaitement devant elle. Tour à tour, elle les ouvrit et s'échappèrent alors son Caninos, son Phanpy et son Zebibron. Ce dernier hennit doucement, heureux de retrouver sa liberté dans ce paysage presque merveilleux tandis que le premier bondissait de partout, léchant à tout va la joue de sa maîtresse. La fillette éclata de rire en le caressant, jetant cependant un coup d’œil inquiet à son Phanpy qui n'avait pas bougé, se contenter de baisser et de lever mollement sa trompe, attendant quelque chose (on ne savait trop quoi).

Le regard qu'elle posait sur eux était plein de tendresse et laissait transparaître tout l'amour qu'elle avait pour eux. Si c’eut été possible de les voir, les ondes positives qu'elle leur envoyait n'aurait été que des enchaînements de cœurs. Elle caressa affectueusement l'encolure de son Zebibron, faisant attention de ne pas se faire électrocuter par les éclairs intempestifs qui parcouraient le corps de son pokémon. Elle était pressée que ce dernier évolue, envieuse de pouvoir le monter. En faisant attention et s'il se contrôlait suffisamment, cela pourrait être très amusant. Monter un pokémon, pourquoi pas après tout ! C'était un moyen de déplacement comme un autre. Elle enfouit son visage dans la fourrure de son Caninos, plongeant ses mains dans le poil doux et chaud.

Son Phanpy s'approcha d'elle, d'un pas pataud et maladroit, comme s'il allait tomber d'un instant à l'autre. C'était tellement attendrissant ! Il était tellement petit et en même temps tellement lourd qu'il laissait sur l'herbe l'empreinte de ses pieds. Elle caressa sa tête et alors qu'elle remettait ses mains sur le corps chaud du Caninos, un bruit résonna derrière elle. Elle se retourna vivement sans voir personne. D'une voix incertaine, elle lança :

« Qui est là ? »

« C'est moi. Je m'excuse, j'espère ne pas t'avoir fait peur. Mais dis-moi, il est assez tôt, que fais-tu ici à cette heure de la journée ? Tu ne devrais pas dormir histoire d'être en forme pour les cours ? »

Assise en tailleur dans l'herbe humide, Nayle ressemblait à une élève modèle qui s'entraîne à peine le soleil levé. A vrai dire, ce n'était pas tout à fait exact puisque la demoiselle ne s'exerçait pas : elle communiquait avec ses amis, faisait connaissance et s'amusait. Elle n'était pas non plus l'exemple type de la bonne étudiante mais on ne pouvait nier cependant qu'elle était l'une des meilleures de sa classe. Cela n'avait néanmoins rien d'étonnant puisqu'elle était là depuis qu'elle avait eu l'âge autorisé pour entrer à l'académie (soit plus d'un an déjà !) et qu'elle travaillait beaucoup pour dépasser ses maîtres. Et malgré l'ardeur qu'elle y mettait, elle n'avait jamais épuisé ses pokémons. Elle les adorait tellement qu'au moindre signe de faiblesse qu'ils montraient, elle arrêtait tout et les cajolait : elle leur vouait une telle admiration que pour certains, c'en devenait presque terrifiant. Mais personne ne s'en était jamais plaint.

Alors qu'elle était justement en pleine séance « communication » et « chouchoutage » de ses pokémons, elle entendit derrière elle craquements et bruissements, indiquant la présence de quelqu'un. Voire de quelque chose. Elle se retourna vivement et héla le vide, à la recherche d'une personne. Quelques secondes plus tard, un individu de grande taille et habillé de telle façon qu'on aurait dit un gentleman sortit de derrière un arbre, accompagné de ce qui semblait être un Etourmi. Il semblait légèrement embarrassé et à sa plus grande surprise, Nayle reconnut l'un de ses professeurs. Elle se leva précipitamment et s'inclina devant lui, comme la politesse l'exigeait. Elle attendit quelques secondes et se releva, ignorant quelques secondes les cris de protestation de ses pokémons qui n'appréciaient pas qu'elle les délaissât pour un autre.

« C'est moi. Je m'excuse, j'espère ne pas t'avoir fait peur. Mais dis-moi, il est assez tôt, que fais-tu ici à cette heure de la journée ? Tu ne devrais pas dormir histoire d'être en forme pour les cours ? »
« Bonjour Leak-sama. »

La fillette eut une petite moue gênée, agréée d'une pointe d'agacement presque imperceptible. Si seulement elle avait pu dormir plus, elle ne s'en serait pas privée ! Mais ce qui l'avait réveillé traînait encore dans son esprit et l'avait empêchée de retourner dans les bras de Morphée, qu'elle affectionnant pourtant tellement. Elle soupira discrètement, regrettant la chaleur de sa couette.

« Vous m'avez juste surprise, ne vous inquiétez pas ! Et pour répondre à votre question, je n'arrivais pas à dormir alors je me suis dit que quitte à être levée, autant l'être avec mes pokémons ! Et puis, il parait que je n'ai pas cours ce matin ... Cela dit, si je puis me permettre, Leak-sama, je vous retourne la question ? »

Directe et franche, comme toujours. Ce petit côté sincère ajoutait d'ailleurs encore à son image enfantine et naïve, la rendant d'autant plus adorable. Elle fixa son attention sur le petit pokémon qui sautillait aux côtés de son maître et lui sourit.

« Votre Etourmi est très mignon, Leak-sama ! »

Derrière elle, son Caninos jappa bruyamment, jaloux. Elle éclata de rire et le colla contre elle, le câlinant joyeusement.

« Mais toi aussi, tu es adorable, Cani-chan ! »

« Ah, c'est une longue histoire ! Tu sais, des fois à force de boire un certain nectar, on se sent pas très bien et on s'endort très tôt. Malheureusement, c'est pas parce qu'on trouve le sommeil vite qu'on reste dans les bras de Morphée très longtemps. Qui plus est, lorsqu'on se réveille on a souvent une forte migraine et des difficultés à se rendormir. Tu vois ce que je veux dire, non ? Bref, c'est pour ça que je suis ici ! Je me suis réveillé tôt et je sais pertinemment que je ne serais pas en mesure de retrouver le sommeil. Et puis de toute façon, la marche c'est bon pour le corps. »

« Je te remercie. Tes pokémons aussi sont charmants. De plus, ils ont vraiment l'air de t'apprécier. Je suppose que tu dois vraiment bien t'occuper d'eux. Je suis fier de toi ! »

Lorsque l'on y repensait, son emploi du temps était bien plus que léger que celui de n'importe qui d'autre. Elle n'avait pas tant de cours différents que ça et les heures qui y étaient consacrées étaient bien moins importantes que pour les années supérieures (sans parler des master !). Cela dit, elle ne s'en plaignait pas. Il était tellement agréable d'avoir des après-midi entiers de libre pour flâner avec ses pokémons alors que d'autres travaillaient avec acharnement leur théorie dans des salles de classes ou leur pratique dans ce qui servait de salle d'entraînement ! Elle pouvait vaquer à ses occupations sans se préoccuper du reste et à sa guise ; et le mieux dans tout cela, c'est qu'elle n'était jamais seule. Son Caninos était toujours avec elle et maintenant qu'elle avait un Zebibron, ce dernier l'accompagnait également très fréquemment. Et puis, même s'il est vrai qu'elle aurait pu profiter de sa matinée pour dormir, ne dit-on pas que « l'avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt » ? Certes, elle n'avait pas fait exprès de se réveiller aux aurores, mais c'était un détail, n'est-ce pas ?

Quand elle eut finit d'expliquer les raisons de sa présence à son professeur, elle lui retourna le plus poliment possible la question. Son insatiable curiosité ne tenait pas compte des limites entre élève et enseignant et l'obligeait sans cesse à ouvrir la bouche pour poser des questions. A vrai dire, Nayle n'essayait pas non plus de réfréner son inassouvie soif de savoir : on lui avait dit une fois que la curiosité pouvait autant être un défaut qu'une qualité et elle préférait ainsi voir son intérêt comme une qualité. C'était un moyen comme un autre d'arriver à ses fins.

Une fois le dernier mot sortit de sa bouche, Eric tritura sa barbe comme s'il était en pleine et intense réflexion, cherchant certainement ce qu'il pouvait répondre à une enfant de onze ans sans se trahir. La croyait-il incapable de comprendre ? La fillette haussa un sourcil, interrogative et impatiente d'avoir une réponse. Ses professeurs savaient pourtant bien qu'elle était intelligente. Pourquoi s'obstinaient-ils à la sous-estimer ? Elle ne cherchait pas non plus à se sur-estimer mais pour une fois, elle aurait apprécié que quelqu'un la considère à sa juste valeur !

« Ah, c'est une longue histoire ! [...] Et puis de toute façon, la marche c'est bon pour le corps. »

A la fin de cette explication qui aurait tout aussi bien pu être donnée à un enfant de cinq ans, Nayle eut une moue légèrement narquoise. Elle avait sentit que son interlocuteur voulait noyer le poisson à la fin de son laïus mais elle ne s'y laissa pas prendre.

« Ah, je vois. Vous étiez soûl, donc ? Ma mère disait souvent que ce n'était pas digne de notre famille mais elle laissait parfois nos domestiques se faire plaisir. Je crois qu'ils se réfrénaient pourtant beaucoup ... »

Autant pour la subtilité, la jeune fille préférait aller droit devant. Ce n'était peut-être pas très respectueux de relever l'ancienne ivresse de son prof mais n'était-ce pas lui qui lui avait expliqué avec force détails alors qu'il aurait tout aussi bien pu lui sortir un mensonge aussi gros que sa gueule de bois ? D'un côté, elle lui était reconnaissance de sa franchise : les adultes avaient souvent tendance à croire les enfants incapable d'entendre la vérité ...

« Enfin, vous avez sans doute raison. Il fait super bon ce matin ! » Après un léger sourire moqueur, elle ajouta : « Et ne vous inquiétez pas. Je ne dirai rien. »

Qui eut crut que cette gamine pouvait être aussi railleuse ? Puis, histoire de tendre une perche au charmant gentleman qu'était Eric, elle changea de sujet et adressa un compliment au petit Etourmi. Le premier lui sourit gentiment et lui retourna le compliment.

« Je te remercie. Tes pokémons aussi sont charmants. De plus, ils ont vraiment l'air de t'apprécier. Je suppose que tu dois vraiment bien t'occuper d'eux. Je suis fier de toi ! »
« Oh, merci ! C'est très gentil. J'essaie de faire de mon mieux pour m'occuper d'eux ! »

A ses mots, son Caninos se frotta contre sa jambe tandis que son Phanpy trompetait joyeusement en même temps que son Zebibron venait frotter son chanfrein contre son épaule. Un tableau parfaitement charmant, n'est-ce pas ? Tout le monde en aurait convenu à cet instant.

Perspicace ? Oui, on pouvait dire cela ainsi. Enfin, ce n'était peut-être pas totalement vrai puisque la jeune fille ne tirait pas réellement des conclusions : elle comprenait juste les sous-entendus des adultes qui persistaient à la prendre pour une gamine incapable de saisir quoi que ce soit. C'était d'un frustrant ! Ne pouvaient-ils donc pas lui parler telle à une adulte ? Certes, elle n'en avait pas l'âge et encore moins la taille mais après tout, pourquoi pas ? Elle n'était pas non plus présomptueuse au point de se croire omnisciente mais elle savait tout de même faire la différence entre beaucoup de choses ; ses parents lui avaient répété un nombre incalculable de fois qu'elle devait toujours faire confiance à son intelligence et c'est ce qu'elle faisait. Breff. La fillette et le professeur échangèrent quelques mots à propos du penchant alcoolisé du second puis changeant brusquement de sujet, ce dernier lui fit quelques compliments sur la façon dont elle traitait ses pokémons ainsi que sur la complicité flagrante qu'ils entretenaient. Nayle en retira une grande fierté : elle travaillait dur pour y arriver, après tout, et il était toujours plaisant de savoir que ses efforts n'étaient pas vains. Elle avait beau le constater elle-même, un petit mot extérieur était bien plus encourageant.

Sur ces bonnes paroles, le professeur s'inclina galamment, signe qu'il s'en allait : sans doute avait-il beaucoup de choses à faire et la fillette s'en voulut de l'avoir importuné, ne serait-ce que quelques minutes. En outre, elle était elle-même venue ici pour « s'entraîner » (à sa manière, du moins) avec ses pokémons et non pour tailler la bavette avec l'enseignant. Ce n'était, d'un côté, pas plus mal qu'il s'éloigne donc. Elle s'inclina à son tour, le saluant avec tout le respect qu'elle lui devait. Elle avait beau détester le ton condescendant qu'employaient la plupart des adultes, elle savait toutefois les considérer à leur juste valeur : elle n'était qu'une élève de première année, après tout.

Elle se releva alors que le professeur s'éloignait et l'observa tandis qu'il marchait étrangement. Elle nota d'ailleurs qu'il était plus en train de tituber qu'autre chose : était-ce les effets de l'alcool qui revenaient au grand galop ? Inquiète, elle fronça les sourcils et une moue soucieuse transforma sa jolie bouche. Elle le vit dodeliner de la tête et plisser les yeux, comme s'il cherchait à affiner sa vue. Etait-il en train de voir trouble ? Elle n'eut de toute façon guère le temps de se poser plus de questions car à peine Eric avait-il fait deux mètres qu'il s'écroula littéralement de tout son long sur l'herbe verte, sans que ses bras aient le réflexe d'amortir la chute. Écarquillant les yeux, Nayle se précipita vers lui, consternée. Son coeur battait la chamade et elle avait l'impression qu'il aurait voulu sortir de sa poitrine. Son esprit s'était retourné et elle perdait tous ses moyens. Elle n'avait jamais été très calme et voilà que son émotivité lui faisait défaut. Bon sang ! Que devait-elle faire ? Face contre terre, le professeur semblait évanoui. La fillette appela ses pokémons pour qu'ils viennent l'aider et avec leur force, elle parvint à retourner le vieil (en tout cas, par rapport à elle) homme. Elle posa une main sur son épaule et le secoua doucement :

« Leak-sama ? Vous m'entendez ? »

Un ronflement sonore lui parvint comme toute réponse. Mon dieu. Il s'était endormi ! Qu'allait-faire ? Que devait-elle faire ?! Il était bien trop lourd pour qu'elle le porte jusqu'au banc le plus proche (qui était au moins à une dizaine de mètres !) et elle n'avait pas réellement envie de le réveiller. Après tout, peut-être était-il comme ces gens irascibles au réveil et qui se déchaînent impitoyablement sur celui qui a osé les sortir des bras de Morphée ... Enfin, ce n'était pas comme si elle avait vraiment le choix, de toute façon. Et à cette heure matinale, personne ne viendrait pour l'aider. Elle pesta longuement puis finit par choisir une solution.

« Phanpy chéri ? », appela-t-elle, consciente qu'elle risquait d'ameuter tout le quartier ... « Est-ce que tu pourrais pousser un très fort barrissement dans les oreilles de ce monsieur, s'il te plait ? Il ne se réveillera jamais sinon ! » Elle soupira et se mordit la lèvre, indécise. Eric allait la tuer. « Oh mon dieu, oh mon dieu. Bon, vas-y ! » Elle se boucha les oreilles.

Tout joyeux, le Phanpy s'approcha d'un pas pataud près de la tête du professeur et prenant ce qui ressemblait à une grande inspiration, barrit du plus fort qu'il put dans les oreilles de l'adulte. Une fois cela fait, il leva sa trompe et sautilla aussi légèrement qu'il lui était possible : autant dire, pas du tout. Nayle n'avait même pas regardé si cela avait fonctionné ; elle était déjà agenouillée, le front contre terre, à côté d'Eric.

« Excusez-moi, Leak-sama. Je vous demande pardon. Je suis désolée. Désolée. Désolée. Je ne voulais pas vous réveiller mais je ne pouvais pas vous laisser endormi. Je suis désolée ! Oh mon dieu, tellement désolée ! »

Et elle aurait pu continuer ainsi trèèès longtemps ...

« Ahhhhhhhh. »

« Ce n'est rien. Tu m'as juste : Sorti d'un très beau rêve, fais perdre les trois quarts de mon audition, assuré le port d'une prothèse à l'oreille gauche avant mes cinquante ans mais ne t'en fais pas. En tout cas, je te remercie. J'aurai eu l'air fin moi si je serai resté un peu plus affalé au sol. »

Elle allait se faire tuer, bien sûr. On ne réveille pas un adulte. Non, on ne réveille jamais un adulte. C'était un sacrilège, un outrage à leur condition, une violation des règles les plus implicites de ce monde. Un adulte qui dort est un adulte qui ne parle pas, et par conséquent, un adulte qui ne prend pas de ton condescendant lorsqu'il s'adresse à une gamine de son âge. Un adulte qui dort ne dit rien de méchant et s'il ronfle, c'est toujours mieux que s'il s'acharne sur un pauvre élève. Un adulte qui dort est donc un gentil adulte. CQFD.

Tout ça pour dire, donc, qu'elle aurait dû le laisser se reposer en paix, quitte à ce qu'il soit exposé aux regards de toutes les personnes qui auraient bien pu passer par là à cette heure matinale. (Et vu la gueule de bois qu'il avait, de toutes les personnes qui auraient bien pu passer pendant la journée puisque si elle n'avait rien fait, il aurait sans doute dormi jusqu'au soir. Voire plus encore). Breff. Agenouillée sur le sol et le front touchant l'herbe, elle enchaînait les excuses et les répétait comme s'il en allait de sa vie (ce qui était presque le cas, assurément). Dans sa tête, tourbillonnait mille et une pensées négatives et pessimistes qui soufflaient une fin proche et imminente. Au secours !

Phanpy, quant à lui, trouvait amusant de rester collé au cher professeur, lui soufflant dessus à tout va et poussant quelques barrissements légers, comme si le premier n'avait pas suffit. Gémissant d'exaspération et de frustration, Nayle tendit la main et l'agrippa par la trompe, le forçant à revenir vers elle sans discuter. Eric avait déjà bien souffert de son réveil violent : il était inutile d'en rajouter encore plus. A moins qu'elle ne soit masochiste, mais ce n'était assurément pas le cas.

Quelques instants plus tard, elle entendit Eric se relever et un bruissement de vêtements vint accompagner son mouvement. Le moment était venu de recevoir sa sanction. Peut-être serait-il clément, d'ailleurs, et ne la suspendrait-il que quelques jours ? A moins qu'il ne supportât plus de la voir et veuille la renvoyer chez elle. Ce serait encore pire que tout et ses parents seraient tellement déçus qu'elle ne pourrait plus les regarder en face. Mais sûrement se faisait-elle aussi des idées. Le professeur était généralement assez gentil et il ne pouvait avoir que de la peine pour elle. N'était-elle pas adorable à un point que n'importe qui (ou presque) aurait pu se damner pour elle ? Si, bien sûr. Ahem.

« Ce n'est rien. Tu m'as juste : Sorti d'un très beau rêve, fais perdre les trois quarts de mon audition, assuré le port d'une prothèse à l'oreille gauche avant mes cinquante ans mais ne t'en fais pas. En tout cas, je te remercie. J'aurai eu l'air fin moi si je serai resté un peu plus affalé au sol. »

En entendant ces mots, Nayle rougit violemment et son cœur manqua un battement. Elle avait beau être jeune, le sarcasme présent dans cette répartie était flagrant. Bon sang, Eric lui en voulait vraiment ! En même temps, ce n'était tout de même pas sa faute s'il était sortit avec une gueule de bois ! Il n'avait qu'à faire attention après tout, et il aurait été bien mieux au lit. Cela dit, ce n'était pas quelque chose qu'elle pouvait affirmer en toute insolence, évidemment. En outre, elle détestait lorsque des adultes la réprimandaient, elle qui adorait faire les choses bien. Il n'était pas courant qu'elle se trompe ou qu'elle fasse une bêtise et même si on lui pardonnait souvent assez rapidement, les phrases lapidaires qu'on pouvait lui asséner pour lui faire comprendre que c'était mal lui faisaient toujours le même effet. C'était horripilant.

« Je ... » Elle hésita. Avait-elle droit à la parole ? Tant pis, elle verrait bien. « Je suis vraiment navrée de vous avoir tiré du monde des rêves, Leak-sama. Mais il me semblait bien plus important de vous voir réveillé afin qui vous puissiez rejoindre votre lit au plus vite. » Une petite moue déforma ses lèvres, invisible à cause de sa tête baissée. Elle continua. « J'espère que vous me pardonnerez mon audace et mon insolence, mais il aurait-été malvenu que quelqu'un vous voit dans cet état, ne pensez-vous pas ? »

Après tout, il pouvait toujours rejeter la faute sur elle et sur son Phanpy, mais ce n'était quand même pas elle qui avait bu à s'en faire exploser la tête ! Les adultes n'étaient jamais satisfaits, c'est bien connu. Oui, décidément ... Un adulte qui dort est bien plus intéressant qu'un adulte éveillé.

« En effet, tu as raison. En tout cas ne t'en fais pas, je te pardonne. »

« Bon, ce n'est pas tout mais je vais aller faire un tour chez Audi...Euh...Oui chez Audi ! Je vais m'acheter une nouvelle voiture tient ! Passe une bonne journée avec tes Pokémons. »

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