Une serveuse au sale caractère
Lucresia & Diane

CRÉDIT - CSS

Des nombreuses personnes font des aller-retour déambulant à travers les plages de sable. Personne ne portait attention aux autres, concentré dans leur promenade ou leurs achats. C’était une masse où il était difficile de discerner le moindre visage sans s’arrêter et sans daigner observer ce fourmillement. C’était un combat pour les multiples échoppes ou boutiques d’attirer des clients en tout genre. Eveiller l’intérêt dans ce ramdam nécessitait d’user diverses stratégies : enseignes bien visibles, des articles mis en avant, des promos à tout va selon le budget, des couleurs qui aimantaient le regard sur elles. Rien qu’observer cela était intéressant. Voir le comportement des autres, essayer de deviner ce qui les attireraient paraissaient être une compétition entre toutes les boutiques. C’était du moins ce que pensait Diane en train de débarrasser une table. La demoiselle en profitait pour s’attarder une poignée de minute pour contempler ce spectacle humain et se reposer un peu.

La dresseuse passait son samedi à faire des petits boulots pour pouvoir subvenir à ses besoins mais aussi à améliorer ses relations avec les élèves d'Alcea Rosea qui passaient par là. Depuis son arrivée à l’académie, malgré les aides de cette dernière, la Lychnis désirait avec un peu d’indépendance. Cette envie de liberté la submergeait souvent. Depuis un mois, elle travaillait en tant que serveuse au café de la place nommé Muffins, Poffins & cie. C’était une journée calme, seulement les personnes habituées venaient saluer les serveurs et savourer une boisson fraîche. L’étudiante se concentra à nouveau sur la table, jetant des coups d’œil aux clients qui s’éloignaient vers une boutique de souvenirs. Elle sourit et aperçut sur la coupelle la paye. Un plateau dans une main, elle vérifia et soupira de soulagement : le compte était bon. Elle plaça d’abord les ensembles tasses et coupelles et les cuillères sur son plateau et prit ensuite l’argent. Elle déambula d’un pas vif mais prudent pour ne rien renverser et rentra dans le café en souriant aux clients. Cependant le drame faillit se produire car elle se cogna contre la marche qui séparait l’intérieur du café et la terasse. Diane étouffa un juron, attirant bien sur l’attention de tous. Elle reprit rapidement contenance en se redressant avec fierté. Il n'y avait pas eu de casse. Elle posa le plateau sur le bar où un collègue la remercia et repartit pour laver les couverts.

« - Tu as l’air de te plaire ici, la maladroite. » déclara un homme derrière le bar d’un ton amusé presque moqueur.

La jeune femme se retourna, les sourcils froncés et croisa les bras pour montrer une désapprobation.

« - Au moins ça plaît aux clients, certains disent même que je suis moe-bien que je comprenne pas le terme- sous mes airs de frigide. Evitez vos remarques sarcastiques, patron. » Répondit-elle au tac-o-tac.

L’homme, qui était le gérant de l’établissement, éclata de rire et lui tapota l’épaule avant de la laisser reprendre son travail des clients apparaissant sous l’embrasure du café. La dresseuse inspira fortement et se dirigea vers les nouveaux arrivants, prête à les accueillir. Pendant les quelques mètres qui les séparaient, elle se rendit compte qu’elle avait évité de répondre au fait qu’elle était à l’aise ici. Elle ne se forçait pas à parler, arrivait même à être chaleureuse et à lancer un semblant de discussion avec les autres. Ce travail l’obligeait à aller vers autrui pour assurer le bon fonctionnement de Muffin, Poffins & cie mais aussi de garder la clientèle. Mais étrangement, elle s’adapta très vite et ne se forçait plus lors de son service. Elle sourit à cette pensée et partit accueillir les invités.

A votre service, mam'zelle !

■ Malgré la faible affluence à cause du temps, certaines personnes profitaient de leur journée pour savourer muffins, cupcakes et compagnie. Pendant que des couples et des groupes d’amis discutaient à leur table et se voyaient gratifier d’un sourire des serveurs, Diane nettoyait les autres libérées par des clients satisfaits du service. Elle sourit pleinement quand elle vit quelques pourboires et même des commentaires complimentant le repas ou même donnant des conseils pour améliorer certains détails sur les tickets de caisse. Aujourd’hui, était une bonne journée. Seulement, à la vue des nuages sombres, la plupart des invités se dépêchaient de finir leur commande pour rentrer chez eux et se réfugier. La Lychnis soupira, s’inclina et salua tous ceux qui s’en allaient. On aurait dit un troupeau de moutons effrayés que leur pelage soit trempé par une bonne drache. Diane haussa les épaules avant de faire les comptes. La salle du rez-de-chaussée était quasi vide. Tant mieux, ça permettait au personnel de se reposer quelques minutes.

Dans un grondement, la pluie joua alors une symphonie sur le toit de l’établissement. L’étudiante arrêta son travail quelques minutes pour écouter la mélodie. C’était agréable. On aurait dit que les gouttes s’amusaient avec les tuiles, les frappant comme s’il s’agissait d’un xylophone. Cela pouvait paraître anodin ou ridicule d’apprécier ce genre de sons mais Diane ne s’en lassait pas. Après tout, certains musiciens s’inspiraient de la musique de la nature et essayaient de la retranscrire. La jeune femme déplora que rare étaient la personne qui s’attardait sur ce genre de détails. Elle laissa ensuite l’averse s’amuser avec la toiture pour aller ranger les sièges dérangées au tour des tables. A croire que le temps s’était allié à la bâtisse de brique, en effet la pluie apportait de nouveaux clients potentiels. Tout le personnel se doutait que ces personnes ne venait que juste pour s’abriter des larmes du ciel mais il en profita pour accueillir les arrivant avec le sourire leur demandant de s’installer au sec et au chaud. La Lychnis ne put s’empêcher de les trouver machiavéliques. Les nouveaux ne pouvaient rien faire d’autres que regarder la carte du café ou discuter de la décoration ne tarderaient pas à commander.
« Bande de manipulateurs… » pensa-t-elle, mi amusée mi consternée.

Elle jeta un coup d’œil aux futurs clients et remarqua alors une bouille qu’elle connaissait entre mille. Lucresia Mc Queen. Diane ne put retenir un grand sourire. Un détail pourtant la tarauda. La demoiselle de Spiraea ne se promenait pas souvent seule… Soulevant un sourire, elle fit signe à l’un de ses collègues qu’elle s’occupait de cette cliente un peu spéciale. S’armant d’un calepin et d’un crayon, la dresseuse voulut l’accueillir avec sa chaleur habituelle pendant que les conversations commençaient à animer la salle. Mais la réplique de la Mirage la força à retenir un reniflement de dédain. Hé bien, la demoiselle était d’humeur revêche, dites donc. Le sourire revint rapidement même trop rapidement sur le visage de la Lychnis. Elle allait pouvoir s’amuser un peu mais avant il fallait répondre à sa cliente.

« - Je pense que l’uniforme apporte ta réponse à lui seul, répliqua-t-elle narquoise. Je vais te mener à ta table, chère cliente. »

Pourtant malgré le ton plein de défi qu’avait Diane, elle avait au moins l’amabilité de placer la Spiraea près de la fenêtre à une table visible de tous mais les conversations ne pouvaient pas déranger Lucresia si jamais elle avait besoin de s’isoler. La Lychnis se montra étonnement galante. Elle vérifia si sa camarade lui suivait. Suite à une courbette et à un mouvement de bras, elle lui désignait une table. Diane se redressa et s’éloigna le siège de la table pour que sa cliente puisse s’installer correctement. Quand la Lychnis travaillait, fait très rare certes, elle tentait de le faire au mieux. Dans ce café, elle avait tendance juste à être à la caisse, à accueillir les clients, prendre leur commande mais il lui arrivait d’être professionnelle comme à cet instant. Elle montra à Lucresia la carte tout en lui présentant la boisson du jour : un lait vanillé avec un chocolat blanc. Avant de partir, elle répliqua tout de même d’un ton provocateur :

« - Evite de te goinfrer. Au fait, tu vas devoir me supporter, c’est moi qui gère ton service. Heureuse ? »